User:HarryStot/Brouillons 2
Le fondamentalisme se manifeste par une adhésion rigide à des doctrines radicales et peu nuancées, généralement de nature religieuse[1]; mais ce mot est également utilisé pour qualifier des idéologies séculières ou même antireligieuses. Il cherche à justifier une conception du monde répondant à un besoin de sécurité intellectuelle et existentielle, une reconnaissance identitaire ou même à faire prévaloir un pouvoir politique, communautaire ou religieux.
Ce courant de pensée s’est développé au début du XXème siècle en terrain protestant nord-américain, en réaction contre l’exégèse historico-critique développée par le protestantisme du XIXème siècle, contre le modernisme libéral et contre la théologie universitaire. ( 10 ) (10) Luc Chartrand, La Bible au pied de la lettre, Le fondamentalisme questionné, Mediaspaul, 1995, pp. 26, 27 et 133.
Le fondamentalisme religieux ne recherche pas un retour aux fondements de la religion dont il est issu, mais plutôt à ceux que les fondamentalistes considèrent comme tels (Larousse). Ceux-ci en détournent le sens, du moins celui donné par les grandes Églises, dans le but de le rendre conforme à leur a priori idéologique. (10.1) (x) (y) Mais cette forme de christianisme n’est pas une dénomination parmi d’autres : il traverse toutes les Églises (p) et se concentre dans quelques unes (q) .
(10.1) Luc Chartrand, La Bible au pied de la lettre, Le fondamentalisme questionné, Mediaspaul, 1995, pp. 67 et ss
Larousse (en ligne) « Tendance de certains adeptes d'une religion quelconque à revenir à ce qu'ils considèrent comme fondamental, originel ».
http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais
(x) Martin E. Marty et R. Scott Appleby, directeurs du Fundamentalism Project, soutiennent que l'absolutisme du fondamentalisme qu’on dit « religieux » provient d’une déviation de la religion pour affirmer l’identité ou le repliement communautaire ou pour d’autres motifs idéologiques. (10.
Martin E. Marty et R. Scott Appleby, Conclusion: An Interim Report on a Hypothetical Family. Ces auteurs et p. 837
(y) Micheline Milot, « Religion et intégrisme, ou les paradoxes du désenchantement du monde »
Cahiers de recherche sociologique , n° 30, 1998, p. 153, à la page 163. URI: http://id.erudit.org/iderudit/1002659ar DOI: 10.7202/1002659ar « Pour le fondamentalisme protestant américain, il est clair que les troubles de la société américaine découlent directement de la désaffection à l'égard de la religion. […] L'éloignement de Dieu et l'éloignement de l’âge d'or américain sont des processus qui s'emboîtent l'un dans l'autre. » Par exemple, l’auteure mentionne le mouvement « Moral Majority », pour qui l'organisation politique américaine doit impérativement se donner de nouvelles balises, comme les valeurs chrétiennes.
(p) Poulat Emile. Barr (James) Fundamentalism. In: Archives de sciences sociales des religions, n°50/2, 1980. pp. 239-240.
http://www.persee.fr/doc/assr_0335-5985_1980_num_50_2_2215_t1_0239_0000_1
50.380 BARR James)
De plus, rapporte le sociologue Émile Poulat, James Barr estime que le fondamentalisme n’est pas organisationnellement une secte mais « intellectuellement c’est une secte sans aucun doute ».
(q) Kathleen C. Boone, The Bible Tells Them So, The Discourse of Protestant Fundamentalism, State University of New York Press, 1989, p. 79-85 et 96 Par ailleurs, le sociologue Sébastien Fath considère que la violence «ne représente pas un trait commun aux divers fondamentalismes. La violence religieuse n'est pas toujours fondamentaliste, et tous les fondamentalistes sont loin d'être violents (1) . » Toutefois, ceux-ci montrent une radicalité qui tend vers l'intolérance. (1) Ainsi, les fondamentalistes sont persuadés qu’ils sont les seuls détenteurs de la vérité. (1)
Sébastien Fath, Fondamentalisme, Sébastien FATH, « FONDAMENTALISME », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 4 décembre 2015.
URL : http://www.universalis.fr/encyclopedie/fondamentalisme
Depuis la fin des années 1970 la signification de ce mot s’est élargi constamment: on parle maintenant non seulement de fondamentalisme protestant mais aussi de fondamentalisme islamique, juif, catholique, bouddhiste, hindou, shintoïste, païen (0.11 ) et athée (a). 10 et 12 Le fondamentalisme se retrouve également dans la frange la plus conservatrice des grandes religions chrétiennes qui sont pourtant non fondamentalistes. ( Pierre Lathuillière, Le fondamentalisme catholique, Les éditions du Cerf, Paris, 1995, p. 113 )
(0.11) Christopher A. Partridge, « Pagan fundamentalism ? », édité par Christopher A. Partridge, Paternoster Press, 2001, 314 pages, p. 155.
Ainsi, ce mot a une signification étendue et éparse. Le sociologue Émile Poulat souligne que ce phénomène est « difficile à enfermer dans une définition : on ne peut que le décrire, du moins en première analyse. 1 » 1Poulat Emile. Barr (James) Fundamentalism. Dans « Archives de sciences sociales des religions » . N. 50/2, 1980. pp. 239-240.
10 Pasquale, Frank. "Secularism & Secularity: Contemporary International Perspectives". Hartford, CT: Institute for the Study of Secularism in Society and Culture (ISSSC), 2007. p. 46.
10 Harriet A. Harris, How Helpful Is the Term ‘Fundamentalism’, Fundamentalisms, Paternoster Press, 2001, p.14: « Fundamentalists appeal to a foundation that must be true absolutely (in a totally unconditioned way). There is no reason, within this philosophical account, to reserve Fundamentalism for religious movements ».
Marty, M. et Appleby, R.S, « Conclusion: An Interim Report on a Hypothetical Family ». Collectif. The Fundamentalism Project, Volume 1, Fundamentalisms Observed. The University of Chicago Press, 1991, Chicago, London, p. 814.
(1) Pierre Miquel, Les Guerres de religion, éditions Fayard, 1980
(interrel
10 Luc Chartrand, La Bible au pied de la lettre : le fondamentalisme questionné, pp. 26, 27 et 133.
. . Gilles Kepel, La revanche de Dieu- Chrétiens, juifs et musulmans à la reconquête du monde, Seuil, 1991. (ISBN 978-2-02-012929-9)
Le fondamentalisme se distingue par l’absence d’esprit critique. Ainsi, le doute, qu’il soit d’ordre spirituel, existentiel, ou méthodologique n’y est ni désiré, ni valorisé. Il doit être dissipé pour faire place à une certitude intérieure. C’est pourquoi le fondamentalisme s’oppose généralement à l’exégèse historico-critique ou scientifique, qui est adoptée officiellement par les Églises non fondamentalistes pour interpréter les textes religieux. Le fondamentalisme n’admet qu’une lecture au premier degré (t) des textes sacrés, découpés en extraits cités hors contexte historique, culturel et littéraire, comme si ceux-ci étaient des écrits contemporains et occidentaux : Le fondamentalisme « s'oppose à toute interprétation historique et scientifique et s'en tient au fixisme».
12 Le glossaire de l’Église catholique précise que « Le fondamentalisme exclut toute approche critique, pourtant nécessaire, des textes fondateurs. ». http://www.eglise.catholique.fr/glossaire/fondamentalisme/
13 Collectif, Harriet A.Harris, Protestant Fundamentalism », Fundamentalisms, Paternoster Press, 2001, pp. 34-35, « It served to discourage self-critical reflection. It implicitly discredited as false criticism any study that threw up unresolved tensions in scripture. »
(t) Évelyne Patlagean et Main Le Boulluec, Le fondamentalisme. Quelques hypothèses introductives, dans Évelyne Patlagean et Main Le Boulluec. Les retours aux Écritures. Fondamentalismes présents et passés. Éd. Peeters, Louvain-Paris, 1993, 399 pages, p. 25.
Une autre caractéristique inhérente au fondamentalisme religieux est l’hétéronomie, c’est-à-dire une dépendance et une soumission à des textes religieux, qui sont lus hors contexte et au premier degré (t ). Cette hétéronomie s’étend à la soumission à des autorités religieuses, civiles ou politiques. et 16.1
16 Sébastien Fath, Fondamentalisme, Sébastien FATH, « FONDAMENTALISME », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 4 décembre 2015.
URL : http://www.universalis.fr/encyclopedie/fondamentalisme/
16.1. Nancy T. Ammerman, « Fundamentalisms ». Collectif. The Fundamentalism Project, volume I, Fundamentalisms Observed, The University of Chicago Press, 1991, Chicago, London, p. 50.
20 voir aussi Jean-Louis Schlegel, La loi de Dieu, contre la liberté des hommes, Intégrismes et fondamentalismes, Seuil, 2003.
19 BARR James, Fundamentalism, Londres, SCM Press, 1977, 379 p. (Édition de 1981) : « Les gens que d'autres appellent "fondamentalistes" se pensent eux-mêmes et voudraient s'appeler eux-mêmes simplement "chrétiens" ou "vrais chrétiens" : c'est là la véritable perception qu'ils ont d'eux-mêmes. Pour cette raison, toute désignation plus restreinte leur déplaît. Ils veulent penser leur propre position comme la ou la seule position chrétienne [...]. Ironiquement, ce trait dans leur manière de se comprendre, leur conception d'eux-mêmes comme les "vrais" chrétiens est exactement la raison pour laquelle ils sont généralement appelés non pas "chrétiens" mais "fondamentalistes" (p. 45). » Cité par Pierre Lathuilière, Le fondamentalisme catholique, p. 56
Plan
1. Typologie 2. Le fondamentalisme chrétien 2.1 Les sources du fondamentalisme chrétien 2.2. Radicalisme, isolationnisme : hostilité envers la théologie du xxème siècle et l’humanisme séculier 2.3. Le refus du doute méthodologique, lecture au premier degré 2.3.1. la position fondamentaliste 2.3.2. les positions catholiques et protestantes non fondamentalistes
2.4. Le refus du doute existentiel 2.4.1. la position fondamentaliste 2.4.2. les positions catholiques et protestantes non fondamentalistes
2.5 L’explication de causes naturelles des causes surnaturelles 2.5.1. la position fondamentaliste 2.5.2. les positions catholiques et protestantes non fondamentalistes
2.6 L’hétéronomie de la conscience morale : la soumission aux textes religieux 2.6.1 la position fondamentaliste 2.6.2. les positions catholiques et protestantes non fondamentalistes
2.7 L’hétéronomie de la conscience politique: la soumission aux autorités civiles 2.7.1 la position fondamentaliste 2.7.2 la position des Églises catholique et protestantes traditionnelles 2.8 Le millénarisme et l’eschatologie 2.8.1. la position fondamentaliste 2.8.2. les positions catholiques et protestantes
2.9 Dénonciation du dialogue inter-religieux 2.9.1. la position fondamentaliste 2.9.2. les positions catholiques et protestantes
2.10 Le fondamentalisme catholique
3. Les positions du fondamentalisme athée au sujet du christianisme
3.1 Le refus du doute méthodologique ou l’inerrance de la Bible
3.2 Le refus du doute existentiel et l’absence d’esprit autocritique 3.3 Lecture des textes au premier degré et hors contexte 3.4 Indifférence ou hostilité à l’égard de la théologie du XXème siècle 3.5 Le refus du doute existentiel 3.6 L’explication de causes naturelles par des causes surnaturelles 3.7 L’hétéronomie morale : la soumission aux textes religieux 3.8 L’hétéronomie religieuse de la conscience politique: la soumission aux autorités civiles
3.9 Le millénarisme et l’eschatologie
4. Positions du fondamentalisme athée au sujet du christianisme
5. le fondamentalisme dans le judaïsme
6. le fondamentalisme dans l’islam
7. le fondamentalisme dans les religions orientales : le bouddhisme, l’hindouisme, le sikhisme et le shintoïsme.
1. Typologie
Le fondamentalisme se manifeste par un état d’esprit, une mentalité (2) et plusieurs positions doctrinales ( 3 ) en découlent. La typologie utilisée vise à présenter ces positions et non à classifier ou à qualifier des Églises et des groupes.
2 Harriet A. Harris, How Helpful Is the Term ‘Fundamentalism’, dans Fundamentalisms, Edité par Christopher Partridge, Paternoster Press, 2001, 314 pages, p.14 Harriet A. Harris a été professeur de théologie et auteurs de nombreux ouvrages et articles sur le fondamentalisme. http://www.amazon.ca/s/ref=dp_byline_sr_book_1?ie=UTF8&field-author=Harriet+A.+Harris&search-alias=books-ca
( 3 ) L'Académie américaine des arts et des sciences a élaboré de nombreuses études sur les divers types de fondamentalisme religieux, regroupés en plus de 8000 pages sous le titre « The Fundamentalism Project» auquel participèrent des chercheurs du monde entier. Par ailleurs, de nombreux spécialistes ont étudié ce phénomène sous tous ses angles. Selon le professeur Harriet A. Harris, la philosophie et en particulier l’épistémologie devraient être les diciplines utilisées pour cerner les traits distinctifs du fondamentalisme. Il correspond au besoin que ressentent certaines personnes de se baser sur des fondements perçus comme la vérité absolue. Il n’existe aucune raison, suivant son analyse, de réserver ce terme aux mouvements religieux.
Il n’est pas possible de bien saisir les divers fondamentalismes sans les juxtaposer aux grandes religions ou idéologies dont ils sont issus. C’est pourquoi une méthode de corrélation entre les traits essentiels des divers fondamentalismes et les doctrines libérales opposées devrait être utilisée pour les mettre en lumière.
2. Le fondamentalisme chrétien
Le fondamentalisme chrétien « est caractérisé par son opposition radicale aux orientations théologiques des grandes Églises ». Dans son ouvrage « Fundamentalism », James Barr mentionne trois traits du fondamentalisme chrétien tout en précisant que cela ne suffit pas à le définir : « (a) un accent très marqué sur l'inerrance de la Bible, l'absence en elle de toute sorte d'erreur (l’inerrance) ; (b) une forte hostilité à la théologie moderne et aux méthodes, résultats et implications de l'étude scientifique et critique de la Bible ; (c) une assurance que ceux qui ne partagent pas leur point de vue religieux ne sont absolument pas de "vrais chrétiens" ».
17 Luc Chartrand, La Bible au pied de la lettre : le fondamentalisme questionné, Mediaspaul, 1995, p.61.
18 Extrait cité par Pierre Lathuillière, Le fondamentalisme catholique, Les éditions du Cerf, Paris, 1995, p. 55.
Pourtant, James Barr affirme que le fond de l'attitude fondamentaliste ne réside pas dans la Bible. Pour lui, la notion d’inerrance biblique reste secondaire : « […] le cœur du fondamentalisme est un certain type de discours, une manière de parler qui détient l'autorité réelle ». L’innerrance biblique et la lecure des textes religieux servent de bouclier pour justifier un « a priori » idéologique ou une arrière-pensée ultra conservatrice et radicale. D’autres caractéristiques du fondamentalisme sont spécifiques à certains groupes ( 19.1).
19 Pierre Lathuillière, Le fondamentalisme catholique, Les éditions du Cerf, Paris, 1995, p. 56.
(19.1) Marty, M. et Appleby, R.S, « Conclusion : An Interim Report on a Hypothetical Family », dans The Fundamentalism Project, Fundamentalisms Observed, The University of Chicago Press, 1991, Chicago, London, 814, p. 826. D’autres caractéristiques ont été rapportées dans l’étude « The Fundamentalism Project » entreprise en 1991 par l'Académie américaine des arts et des sciences : on y mentionne un dualisme manichéen, divisant le monde entre ceux qui savent et ceux qui ignorent, entre le bien et le mal, entre les sauvés et les élus, etc. On constate aussi une sélection idéologique parmi les divers aspects de la doctrine religieuse originale. Enfin, on observe qu’une sélection judicieuse des nouveaux membres du groupe permet se s’assurer que ceux-ci lui restent fidèles.
2.1 Les sources du fondamentalisme
La pensée fondamentaliste, avant l’apparition du mot, s’est édifiée à partir des agitations qui ont suivi la Réforme protestante, dont les protagonistes furent libérée de la main-mise de Rome concernant l’interprétation de la Bible. Vers 1670, on voit apparaître le piétisme. (faire lien wiki) Des protestants commencèrent à se réunir pour étudier la Bible sous l’influence du pasteur Philip Jacob Spencer.
20 Luc Chartrand , La Bible au pied de la lettre : le fondamentalisme questionné, Mediaspaul, 1995, p. 35.
Chez les catholiques, vers la même époque, le jansénisme de Port-Royal des Champs se situait au voisinage du piétisme fondamentaliste. Le jansénisme fut condamnée par Rome en 1653 et cette condamnation fut renouvelée en 1715.
21 https://fr.wikipedia.org/wiki/Pi%C3%A9tisme
22 Petit dictionnaire de théologie catholique, Karl Rahner et Herbert Vorgrimler, Éditions du Seuil, 1970, p. 402. : « L'analogue protestant du quiétisme est le piétisme. L'un et l'autre représentent une réaction contre la sécheresse d'une théologie d'école et contre une ascèse volontariste de caractère rationnel et stoïque qui étouffe les forces profondes qui agissent dans l'homme, au lieu de les libérer et de les former. Le quiétisme a été rejeté par Innocent XI en 1687 et par Innocent XII en 1699 (D. 1221-88, 1327-49) ».
Pascal, malgré son génie mathématique et philosophique, prit parti en faveur du mouvement janséniste et il en devint son meilleur défenseur. Il a écrit : « C'est le cœur qui sent Dieu et non la raison. Voilà ce que c'est que la foi, Dieu sensible au cœur, non à la raison. » Il résumait là l’essentiel du piétisme tout en le revendiquant. Encore maintenant, on peut observer cet aspect piétiste dans la pensée fondamentaliste.
23 Blaise PASCAL, Pensées, Paris, Gallimard, coll. « Folio », 1977, p. 251
24 Luc Chartrand, La Bible au pied de la lettre : le fondamentalisme questionné, Mediaspaul, 1995, p.61.
La Réforme protestante a libéré l’interprétation biblique de l’autoritarisme de l’Église catholique en permettant à chaque chrétien d’avoir un contact direct avec la Bible, l’autorisant à l’interpréter selon ses convictions. L'évangélicalisme fondamentaliste puise dans le piétisme ( ) 2 pour former courant constitué par couches successives de « Revivals ». 28 rt 29.1 Ces « Réveils » spirituels s’expriment lors de rassemblements à forte dose émotionnelle destinés à montrer la puissance de Dieu. Le pasteur, instruit ou non, manifeste une passion communicative. De tels mouvements existent en milieu protestant américain depuis au moins 150 ans. 30, 31, et 30.1
27 Luc Chartrand , La Bible au pied de la lettre : le fondamentalisme questionné, Mediaspaul, 1995, p.35
28 Pierre Lathuilière, Le fondamentalisme catholique. Signification et ecclésiologie, Cerf, Paris, 1995, 334 p. 18 : « Les prédicateurs de réveils, de John Wesley (1703-1791) à William James Seymour (1870-1922), de Jonathan Edwards (1703-1758) à Lyman Beecher (1775-1863) et Charles Finney (1792-1875), ont suscité de vastes mouvements de conversion ».
29 Nancy T. Ammerman, « Fundamentalisms ». Collectif. The Fundamentalism Project, volume I, Fundamentalisms Observed, The University of Chicago Press, 1991, Chicago, London, p. 18-22.
29.1 Poulat Emile. Barr (James) Fundamentalism. In: Archives de sciences sociales des religions. N. 50/2, 1980, p. 240. : «S’il est une manière de lire la Bible, il devient une façon de la vivre, marquée par la tradition des Réveils.»
30.1 Nancy T. Ammerman, « North American Protestant Fundamentalism», The Fundamentalism Project, Fundamentalisms Observed. Collectif. The University of Chicago Press, 1991, Chicago, London, pp. 6 et 16-17.
Le fondamentalisme fut nommé ainsi pour la première fois lors des réunions de la «Niagara Bible Conference » (1878-1897) et il prit son essor en milieu protestant aux États-Unis, au début du XXe siècle, par la diffusion des brochures populaires de la conservatrice Northern Presbyterian Church, lesquelles ont défini les «Fundamentals» , 32 , auquels le millénarisme a été ensuite ajouté. La diffusion abondante de ces « Fundamentals » explique davantage l’appellation du fondamentalisme que ses causes profondes. En effet, le fondamentalisme chrétien moderne provient essentiellement de réactions : il se dresse contre la philosophie des Lumières, contre le rationalisme anglais du XVIIe siècle, contre l’Aufklärung du XIXe siècle, contre le libéralisme de la modernité, contre l’exégèse historico-critique et scientifique et surtout contre la théologie libérale du XXe siècle. 34
31 Luc Chartrand, La Bible au pied de la lettre, Le fondamentalisme questionné, Mediaspaul, 1995, p. 20 :
« Les cinq points [fondamentaux] portent sur les sujets suivants : premièrement, l'inerrance de la Bible; deuxièmement, la déité de Jésus Christ; troisièmement, sa naissance virginale; quatrièmement, la rédemption du Christ; et, cinquièmement, la résurrection physique de Jésus et son retour dans sa chair. À partir de ce jour, les fondamentalistes constituent une entité sociale repérable et organisée. Cette première organisation vise avant tout à s'opposer à ce qu'il est convenu d'appeler le modernisme. »
32 Collectif Fundamentalisms; Collectif :The Fundamentalism Project, Fundamentalisms Observed, Nancy T. Ammerman, « The University of Chicago Press, 1991, Chicago, London, p. 2 et 22.
Marsden, George M., Fundamentalism and American Culture, (1980) Oxford University Press, Oxford pp. 117 Les principaux fondamentaux furent l’inerrance biblique découlant de l’inspiration divine, la naissance virginale de Jésus, le rachat des péchés, la résurrection de Jésus et la réalité des miracles de Jésus, cela de façon réelle (et non symbolique).
34 Luc Chartrand, La Bible au pied de la lettre : le fondamentalisme questionné, pp. 60 et 133
Ce n’est qu’après la Seconde Guerre mondiale que des Églises protestantes se donnèrent elles-mêmes le nom de « fondamentalistes ». Aujourd'hui, le mot « fondamentalisme » a une connotation péjorative. Ses adeptes préfèrent qu’on les nomme « Conservative Evangelicals », une expression « qui n’est pourtant pas équivalente ».
34 Poulat Emile. Barr (James) Fundamentalism. Archives de sciences sociales des religions. N. 50/2, 1980. pp. 239-240. Commentaire de BARR (James), Fundamentalism. Londres, SCM Press, 1977, 379 p.
2.2 Radicalisme, isolationnisme : hostilité envers la théologie du xxème siècle et l’humanisme séculier
2.2.1 Un fondamentalisme radical et hostile envers la théologie moderne
Les fondamentalistes s’opposent à la théologie du XXème siècle, la jugeant trop intellectuelle et déviante. (1)
(1) L’historien George Marsden (https://en.wikipedia.org/wiki/George_Marsden ) affirme que l’essor du fondamentalisme aux États-Unis s’explique surtout par les réactions contre « les développements remarquables » de la théologie du XXème siècle.
Marsden, George M., Fundamentalism and American Culture, (1980) Oxford University Press, Oxford pp. 4-5
(1) Niels C. Nielsen, Jr., Fundamentalism, Mythos, and World Religions, State University of New York Press, 1993, p. 13)
Le théologien Chartrand note que « ce phénomène est caractérisé par son opposition radicale aux orientations théologiques des grandes Églises » 1 « Se méfiant de l'intelligence humaine qui perce difficilement les réalités spirituelles, écrit-t-il, ils [ les fondamentalistes ] tiennent pour suspectes la critique théologique et la recherche intellectuelle en général. […] Dans ce contexte on lira donc la Bible en se méfiant de l'intelligence, l'essentiel étant constitué par la religion du cœur. » 2
1 Luc Chartrand, La Bible au pied de la lettre : le fondamentalisme questionné, Mediaspaul, 1995, p. 61
2 Luc Chartrand, La Bible au pied de la lettre : le fondamentalisme questionné, Mediaspaul, 1995, p. 35
2.2.2 Radicalisme et isolationnisme
Le fondamentalisme est apparu comme un mouvement d’opposition non seulement contre l’exégèse scientifique, mais aussi contre la théorie de l’évolution, l’évangélisme social et les doctrines non orthodoxes, perçus comme les symptômes d’un monde pécheur et corrompu. (SR) Il se décline presque toujours sur fond conflictuel (1.2) ( 2) » . Il peut se manifester par un antagonisme défensif ou conquérant avec qui ne partage pas totalement son approche. (1.1). Par contre, il ne rejette pas toute la modernité mais seulement le libéralisme qu’elle véhicule. (mm)
Parce que les uns deviennent les hérétiques des autres, les fondamentalistes « s'orientent nécessairement vers une dynamique d'oppositions et d'exclusions multiples ». (2)
1.2. Pierre Lathuillière, Le fondamentalisme catholique, Les éditions du Cerf, Paris, 1995, p. 12.
(1.1) Pierre Miquel, Les Guerres de religion, éditions Fayard, 1980
(2) Luc Chartrand, La Bible au pied de la lettre : le fondamentalisme questionné, Mediaspaul, 1995, p. 62
(SR) Susan Rose, Christian Fundamentalism and Education in the United States, p. 483, note 28, dans The Fundamentalism Project, Volume 2, Fundamentalisms and Society : reclaiming the sciences, the family, and education / edited by Martin E. Marty and R. Scott Appleby The University of Chicago Press, 1993, Chicago. Selon l’auteure, les fondamentalistes adoptent un comportement isolationiste, politiquement et socialement conservateur, anticommuniste avec des croyance apocalyptiques.
? Nancy T. Ammerman, « Fundamentalisms ». Collectif. The Fundamentalism Project, volume I, Fundamentalisms Observed, The University of Chicago Press, 1991, Chicago, London, p. 1-66.
(mm) http://www.erudit.org/revue/crs/1998/v/n30/1002659ar.pdf « Religion et intégrisme, ou les paradoxes du désenchantement du monde » Micheline Milot Cahiers de recherche sociologique , n° 30, 1998, p. 153-178. Pour citer cet article, utiliser l'information suivante : URI: http://id.erudit.org/iderudit/1002659ar DOI: 10.7202/1002659ar
L’isolationnisme propre aux fondamentalistes se manifeste par une répulsion contre l’humanisme séculier (q), et parfois le rejet (note sr ) de l’école publique qui, pensent-ils, ne transmet pas leurs valeurs chrétiennes fondamentales. (sr) (sr) (i)
(q) Niels C. Nielsen, Jr., Fundamentalism, Mythos, and World Religions, State University of New York Press, 1993, p. 13
(i) David M. Terman, Director of the Chicago Institute for Psychoanalysis, Fundamentalism and the Paranoid Gestalt, p. 47-61, dans The Fundamentalist Mindset, Psychological Perspectives on Religion, Violence, and History, Charles B. Strozier, David M. Terman, and James W. Jones, with Katharine A. Boyd, Oxford University Press, New York, 2010. L’auteur a étudié la psychologie sous-jacente à l’idéologie fondamentaliste. Il y décèle une paranoïa et un sentiment de rage, qu’il attribue notamment aux menaces et aux attaques perçues contre ses croyances.
(note sr) Ce rejet a été, selon la sociologue Susan Rose, un facteur important du progrès organisationnel des fondamentalistes nord-américains par l’établissement d’écoles privées à leur mesure. ) Susan Rose, Christian Fundamentalism and Education in the United States, p. 483, note 28, dans The Fundamentalism Project, Volume 2, Fundamentalisms and Society : reclaiming the sciences, the family, and education / edited by Martin E. Marty and R. Scott Appleby The University of Chicago Press, 1993, Chicago, p. 452-489.
2.2 La position de l’Église catholique et des Églises protestantes
La théologie du XXème siècle s’est déployée en milieu universitaire, ainsi qu’à l’intérieur de l’Église catholique et des Églises protestantes non fondamentalistes. Malgré l’indépendance universitaire des facultés de théologie, des formes d’association et de consultation avec les théologiens des grandes Églises ont été établis.
Voir par exemple Marc Pelchat, « La théologie universitaire et son rapport avec l’Église : fin ou renouveau du contrat entre l’Église et l’université ? », Théologiques, vol. 14, n° 1-2, 2006, p. 161-176. URI: http://id.erudit.org/iderudit/014317ar
2.3 Le refus du doute méthodologique : une lecture au premier degré, découpée en extraits cités hors contexte
2.3.1 La position fondamentaliste
L’inerrance de la Bible et sa lecture au premier degré supposent, comme postulat, qu’elle soit infaillible ( NtA ) et fiable à tous égards (ag); elle doit être comprise et applicable de manière uniforme à toute époque et en toutes circonstances, sans égard à la culture, au contexte et aux genres littéraires qui ont marqué les auteurs des textes bibliques. (pl) Une telle lecture faite sans méthode historico-critique permet « de dire n’importe quoi » ( 38.1) et conduit à travestir les textes sacrés dans un but idéologique ou selon un a priori théologique (s ). _____________ (NtA) Nancy T. Ammerman, North American Protestant Fundamentalism. Collectif « The Fundamentalism Project », Volume I, The University of Chicago Press, 1984, Chicago and London, p. 5. « Fundamentalists also claim that the only sure path to salvation is through a faith in Jesus Christ that is grounded in unwavering faith in an inerrant Bible. As fundamentalists see the situation, if but one error of fact or principle is admitted in Scripture, nothing—not even the redemptive work of Christ—is certain. » _____________
« All fundamentalists view the jettison of biblical inerrancy as a threat to Christian faith itself. In Christianity and Liberalism, Machen (un auteur fondamentaliste) claims that Christian liberalism, which derives from higher criticism of the Bible, is "not Christianity at all" ». (vrais chrétiens) Kathleen C. Boone, The Bible Tells Them So, The Discourse of Protestant Fundamentalism, State University of New York Press, 1989, p. 89.
(pl) Pierre Lathuilière, Le fondamentalisme catholique. Signification et ecclésiologie, Cerf, Paris, 1995, p. 19. Selon l’auteur, une grande partie du travail des fondamentalistes consiste en une démonstration de l'absence totale d'erreur dans les mots mêmes de la Bible, tout au moins dans ses « manuscrits originaux ».
--- ( s) Luc Chartrand, La Bible au pied de la lettre, Le fondamentalisme questionné, Mediaspaul, 1995, p. 68. ), Le fondamentalisme apparaît comme une grille de lecture servant essentiellement à maintenir son « a priori » théologique. Cela empêche donc toute évolution de la recherche théologique et tout dialogue inter-religieux.
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Les fondamentalistes ne voient aucune difficulté à découper des extraits ou des phrases, à les lire hors contexte, et à faire abstraction de toute exégèse ou herméneutique pouvant les situer correctement et les interpréter. ( 38 et 38.1.) Ils rejettent le symbolisme de la bible (pti) .
38 Jean Baubérot, Le fondamentalisme. Quelques hypothèses introductives. Dans Les retours aux Écritures. Fondamentalismes présents et passés. Éd. Peeters, Louvain-Paris, 1993, pp. 13-30, p. 23. Collectif édité par Évelyne Patlagean et Main Le Boulluec., p. 25-25. « La nouvelle orientation dominante amenée, dans le libéralisme théologique, par le développement de l'exégèse biblique de type universitaire et «scientifique» modifiait structurellement cette situation-type [le sacerdoce universel où chaque chrétien pouvait interpréter la Bible]. Les lectures de la Bible « au premier degré », c'est-à-dire liées à une culture biblique autodidacte et à l'expérience personnelle de la « vie chrétienne », se trouvaient délégitimées. »
38.1 L'exégète Sophie Raymond affirme ceci : « Se passer de l'approche historique et critique, c'est risquer de laisser dire n'importe quoi. [...] L'approche historico-critique évite les pièges du fondamentalisme ». Sophie Raymond, Tendances actuelles de l’exégèse.
http://www.assomption.org/fr/spiritualite/saint-augustin/revue-itineraires-augustiniens/lire-avec-les-yeux-du-coeur/iv-augustin-aujourd-hui/tendances-actuelles-de-l2019exegese-par-sophie-ramond
( ag) Le théologien protestant André Gounelle discute ainsi du fondamentalisme : « Si un des livres de la Bible apparaît plus humain que divin, cela touche l'ensemble et porte atteinte à son statut de Parole révélée. Si on y trouve un seul élément douteux, tout devient contestable. Si on y rencontre une erreur minime sur un point de détail, elle perd sa crédibilité. Le fondamentalisme rechigne à la critique, au sens propre du mot, c'est à dire à la distinction, au discernement, au tri ».
37 André Gounelle, Le fondamentalisme, Les avatars d’un mot. http://andregounelle.fr/vocabulaire-theologique/fondamentalisme.php Les textes bibliques, dans leur version primordiale, doivent être « exempts d'erreur car le Saint Esprit dictait la main de leurs rédacteurs. ». 37 Évelyne Patlagean et Main Le Boulluec, Les retours aux Écritures. Fondamentalismes présents et passés. Éd. Peeters, Louvain-Paris, 1993, pp. 23-24. Collectif édité par Évelyne Patlagean et Main Le Boulluec. Les discussions portent surtout sur la recherche de la version originale. Selon le théologien Pierre Lathuilière, le fondamentalisme « refuse catégoriquement toute méthode exégétique scientifique — de la simple connaissance des genres littéraires, aussi bien que de l'intention de l'auteur jusqu'aux formes les plus complexes de l'exégèse moderne avec le développement de la critique littéraire — stérilisant ainsi toute recherche exégétique et, surtout, toute compréhension des textes sacrés ». ( r ) 38 Luc Chartrand, La Bible au pied de la lettre, Le fondamentalisme questionné, Mediaspaul, 1995, p. 67.
( r ) Henri Lüscher, "Déclarations de Chicago", La revue Promesses, Sommaire du n° 128 avril-juin 1999 http://www.promesses.org/arts/128p3-7f.html
(pti) Paul Tillich, La dynamique de la foi, Les Presses de l’Université Laval, 2012, pp. 44-53. Le fondamentalisme rejette ce que la théologie moderne considère comme un principe d’interprétentation essentiel : les symboles forment le langage religieux et portent la puissance du message biblique; le symbole est le doigt qui pointe vers l’absolu, l’infini, mais le lecteur au premier degré ne regarde que le doigt. La lecture fondamentaliste apparaît comme une grille de lecture servant essentiellement à maintenir son « a priori » théologique.
Le Conseil international pour l'inerrance biblique a publié en 1978 une première déclation dont les articles XII et XIII « affirment l'inerrance de la Bible dans "son intégralité" […] l'inerrance des énoncés dans Genèse 1 à 11 (l'histoire de la création, du déluge, de la tour de Babel et l'origine des différentes nations) est clairement affirmée, et les "illégitimes hypothèses scientifiques sur l'histoire de la terre sont catégoriquement rejetées". L'inerrance, en terme technique, signifie "l'entière vérité de l'Ecriture", et cela touche également "les problèmes de grammaire et d'orthographe,... les phénomènes de la nature...» ( ).
(s)
Les fondamentalistes, précise-t-il, se méfient « des démarches scientifiques lorsqu'ils les considèrent à tort ou à raison comme mettant en péril le noyau des certitudes. […]. On pourrait s'amuser à repérer dans les écrits de certains intellectuels, ou considérés comme tels aujourd'hui, la méfiance — typiquement fondamentaliste — à l'égard des sciences humaines ».(Bau)
39 Luc Chartrand, La Bible au pied de la lettre, Le fondamentalisme questionné, Mediaspaul, 1995, p. 68.
(Bau) 40 Arkoun Mohammed, Baubérot Jean, Drai Raphaël, Smyth-Florentin Françoise. Débat avec Mohammed Arkoun, Jean Baubérot, Raphaël Drai et Françoise Florentin-Smyth. In: Autres Temps. Les cahiers du christianisme social. N°38, 1993. pp. 64-77. http://www.persee.fr/doc/chris_0753-2776_1993_num_38_1_1585
2.3.2 La position des Églises protestantes non fondamentalistes et de l’Église catholique quant au doute méthodique
Les méthodes historico-critiques ( t) ont été initiées au XVIIIème siècle avec les Lumières et développées par le protestantisme allemand à partir du XIXème siècle, avec le progrès des sciences humaines. Cette nouvelle exégèse « portera souvent la marque des philosophies dominantes, qu’il s’agisse de celle de Hegel ou plus tard du positivisme ». 1 Les Églises protestantes non fondamentalistes ont encouragé ces développements alors que les autorités catholiques y sont restés rétifs jusqu’à au XXème siècle. 2
(t) Mireille Brisebois et Pierre Guillemette, Introduction aux méthodes historico-critiques, Montréal, Fides, Coll. Héritage et projet, 35, 1987. http://www.totus-tuus.fr/article-les-deux-methodes-d-interpretation-de-l-ecriture-sainte-historico-critique-et-theologique-86489633.html
1 Anne-Marie Pelletier, Exégèse moderne et contemporaine, Collectif, Le grand livre de la théologie, Eyrolles, 2015, p. 83-84.
2 id.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Ex%C3%A9g%C3%A8se
D’autre part, Luc Chartrand considère que « la lecture fondamentaliste de la Bible ne peut être acceptable de la part d'un catholique ». Selon lui, les mêmes mots lus par des personnes différentes ne font alors que refléter la pensée du lecteur. 3
3 [Références Les mêmes mots lus par des personnes différentes reçoivent des identifications qui ne font que refléter la pensée du lecteur. C'est cette pensée du lecteur fondamentaliste que l'on retrouve dans les interprétations qu'il nous livre au sujet du discours biblique. Chartrand p. 136]
En 1943, l’Église catholique s’est officiellement ralliée à la méthode scientifique historico-critique. L'encyclique Divino Afflante Spiritu, Pie XII encouragea les méthodes critiques d'exégèse et le recours aux sciences utiles à l'interprétation de l'Écriture. En 1965, le texte conciliaire Dei Verbum, adopté lors de Vatican II, fit en sorte que l’exégèse de type scientifique soit axée sur recherche de l'intention de l'auteur biblique et la détermination des genres littéraires, compte tenu des conditions de son époque et de sa culture. La recherche du sens spirituel demeurera également essentielle. [ ]
Note L’exégète Sophie Raymond affirme que la méthode littérale historico-critique permet de « reconstituer les différentes étapes de la composition littéraire des textes bibliques et de repérer leur contexte historique. Ses étapes sont : la critique textuelle, l’histoire des traductions, les recherche des sources, l’établissement des genres littéraires, l’histoire de la tradition et la critique de la rédaction » Elle précise que cela suppose l’étude des langues, l’archéologie, l’histoire des religions et la littérature comparée.
Tendances actuelles de l’exégèse, Revue Itinéraires Augustiniens,
Le concile Vatican II a réitéré la justesse de la critique historique qui va au-delà d’une lecture « littéraliste » pour rechercher l’intention véritable des auteurs bibliques. [] Commission biblique pontificale, L’interprétation de la Bible dans l’Eglise, Montréal, Editions Paulines, 1995, pp. 38-39.
Référence
1 Le Concile Vatican II recommande l'étude des genres littéraires : « Pour découvrir l'intention des écrivains inspirés, on doit, entre autres choses, considérer aussi les "genres littéraires". […] Il faut donc que l'interprète cherche le sens que l'écrivain inspiré, en des circonstances déterminées, dans les conditions de son temps et l'état de sa culture, employant les genres littéraires alors en usage, entendait exprimer et a de fait exprimé. En effet, pour vraiment découvrir ce que l'auteur sacré a voulu affirmer par écrit, on doit tenir un compte exact soit des manières naturelles de sentir, de parler ou de raconter courantes en son temps, soit de celles qu'à cette époque on utilisait çà et là dans les rapports humains. » (Constitution dogmatique « Lumen Gentium) »
http://www.vatican.va/archive/hist_councils/ii_vatican_council/documents/vat-ii_const_19641121_lumen-gentium_fr.html
2.4 Le refus du doute existentiel
2.4.1 La position fondamentaliste
Le fondamentaliste a pour assise une foi qui relève de la volonté et de l’affectivité. La foi de celui-ci se traduit par une ferme adhésion qui ne doit laisser subsister aucun doute.
[ Niels C. Nielsen, Jr., Fundamentalism, Mythos, and World Religions, State University of New York Press, 1993, p.18, où l’auteur cite par exemple l’ex-président d’une Église fondamentaliste du Texas: « The divine origin of the Scriptures is now disputed in the name of scholarship, science and religion. […] Much of the learning and theological activity of the present hour is dedicated to the attempt to discredit and destroy the authenticity and authority of God's Word. The result of this crisis is that thousands of nominal Christians are plunged into seas of doubt. ».
Face aux complexités changeantes de la vie moderne, au sécularisme humaniste et aux incertitudes politiques et économiques, le fondamentalisme offre une explication qui satisfait aux besoins de sécurité et de stabilité. C’est pourquoi il se retrouve parmi les groupes les plus conservateurs de la société.
Niels C. Nielsen, Jr., Fundamentalism, Mythos, and World Religions, State University of New York Press, 1993, p. 22: « Protestant fundamentalists tend to be conservative and to support the economic and social establishment in the community with little or no sense of tension between belief and their everyday activities ».
http://andregounelle.fr/vocabulaire-theologique/fondamentalisme.php
2.4.2 La position de l’Église catholique et des Églises protestantes non fondamentalistes quant au doute existentiel
La position de l’Église catholique est résumée dans son Glossaire, qui définit le doute : « Interrogation caractérisée par l’hésitation et la perplexité. Les personnes qui doutent se rencontrent chez les croyants, non chez les incrédules. Douter peut se situer à l’intérieur d’un cheminement spirituel et permettre de progresser dans « l’intelligence de la foi » car la foi et le doute ne se contredisent pas fondamentalement. […] eglise.catholique.fr/glossaire/doute
Pierre Lathuilière souligne qu’il « ne s'agit nullement de mettre le vécu de la foi hors de portée des critiques et des assauts du doute ». Il cite Sulivan : « Toute certitude est mise à mort de Dieu. L'athéisme classique a ses racines dans les certitudes ».
Il en est de même de la position des Églises protestantes non fondamentalistes. Paul Tillich a analysé la foi en tant que préoccupation ultime (Dieu, le matérialisme, le succès, le pouvoir etc.) : elle ne relève ni de la volonté ni de l’émotion. L’objet de la préoccupation ultime de chacun devient son Dieu et le doute porte sur le risque que comporte une vie qui assume cette préoccupation ultime. Ainsi, le doute est assumé par le courage et non par la volonté ou l’affectivité. Celles-ci ne précèdent pas la préoccupation ultime mais la mettent en œuvre.
2.5 L’explication de causes naturelles par des causes surnaturelles
2.5.1 La position fondamentaliste
Le fondamentalisme adopte l’une ou l’autre de ces trois positions pour définir la relation entre sa pensée et les théories scientifiques : l’anti-scientisme, le fidéisme ou le concordisme.
L’anti-scientisme, dont fait partie le créationnisme, consiste à nier les théories et découvertes scientifiques, telle que l’évolution. (LXV) S’en tenant à la vérité d’une lecture "fondamentaliste" de l’Ecriture, le créationnisme conteste les résultats scientifiques concernant l’âge de l’univers et l’évolution des espèces.
Par ailleurs, les fidéistes ne nient pas les résultats scientifiques, mais soutiennent que la « conviction et l’abandon du cœur », devraient se situer dans des voies séparées et surpasser la raison, comme le croyait Pascal. ». (1) Voir aussi le Petit dictionnaire, p. 186). Le fidéisme implique l'autonomie des deux savoirs correspondants qui ne se rencontrent jamais.
Réf. « Il n’y a proprement fidéisme que si la foi supplante la raison dans une matière que l’on considère comme lui appartenant ». ( 2 ) Le fidéisme s’oppose donc à la théologie naturelle et à la philosophie de la nature.
(2) André Lalande, Vocabulaire technique et critique de la philosophie », (Quadrige / PUF, 2010, p. 350 (citation de J. Lachelier).
Le concordisme recherche honnêtement la vérité scientifique mais suppose que les récits bibliques sont en accord avec la science.
Pour une grande partie des groupes fondamentalistes, l’une des principales fonctions de la religion et du sacré consiste à expliquer l'univers et les phénomènes naturels : La Genèse n’est pas considérée comme un mythe symbolique de la création mais comme une description d’événements historiques et causals.
http://andregounelle.fr/tillich/la-creation-selon-tillich.php
Niels C. Nielsen, Jr., Fundamentalism, Mythos, and World Religions, State University of New York Press, 1993, pp. 18-19.
Sébastien FATH, Typologie des créationnismes en milieu protestant aux États-Unis, http://blogdesebastienfath.hautetfort.com/media/00/00/714133312.pdf, lu le 10 décembre 2015. http://blogdesebastienfath.hautetfort.com/media/00/00/714133312.pdf
D’autres croyants, On appelle "concordisme" la volonté de faire coïncider les résultats scientifiques avec le donné biblique lu de manière quasiment littérale.
Le théologien et bibliste Pierre-Maurice Bogaert a critiqué les tendances scientistes et concordistes d’un ouvrage cherchant à montrer la vérité de la Bible à partir de découvertes archéologiques. ( ) Pierre-Maurice Bogaert, Exégèse et archéologie. À propos de « La Bible dévoilée », Revue théologique de Louvain, Revue théologique de Louvain, 34, 2003, 64-70.
http://www.persee.fr/doc/thlou_0080-2654_2003_num_34_1_3272?h=fondamentalisme
« W. Keller visait avant tout à montrer la vérité de la Bible à partir des découvertes archéologiques et à expliquer tant bien que mal les divergences. […] La vérité est archéologique; il s'agit ensuite d'expliquer tant bien que mal le texte biblique (les livres historiques essentiellement). Un fondamentalisme contre un autre. » (p. 64) « Que les livres historiques de la Bible ne soient pas dus à «une quelconque révélation miraculeuse» (l'inspiration est autre chose), je suis prêt à souscrire à cette affirmation avec la très grande majorité des biblistes. Mais l'opération réductrice consistant à ne retenir de l'histoire biblique que ce que l'archéologie peut en démontrer n'est qu'un fondamentalisme scientiste, contre-pied du fondamentalisme religieux ». (p. 66).
Pierre-Maurice Bogaert, Exégèse et archéologie. À propos de La Bible dévoilée, Revue théologique de Louvain, Revue théologique de Louvain, 34, 2003, 64-70. http://www.persee.fr/doc/thlou_0080-2654_2003_num_34_1_3272?h=fondamentalisme
2.5.2 La position de l’Église catholique et des Églises protestantes non fondamentalistes concernant la création
Le catholicisme ne considère pas la création comme une notion explicative et causale de l’univers comme s’il s’agissait d’un concept scientifique. Jean-Paul II a affirmé ceci en 1985: « Vouloir prouver scientifiquement l'existence de Dieu signifierait abaisser Dieu au niveau des êtres de notre monde et donc se tromper déjà, méthodologiquement, au sujet de ce que Dieu est ».
Jean-Paul II, Documentation catholique, 1902, ler septembre 1985, p. 864), cité par Pierre Lathuilière, Le fondamentalisme catholique, Les éditions du Cerf, Paris, 1995, p. 196, note 2.
À l’âge préscientifique, seuls les mythes pouvaient donner une explication de l’univers. Lorsque la science est apparue avec Galilée et Newton, il y eut confusion des genres, ce que l’Église n’a pas alors saisie. (Niels C. Nielsen, Jr., Fundamentalism, Mythos, and World Religions, State University of New York Press, 1993) Pourtant, l’interprétation symbolique de la création dans la Genèse n’était pas nouvelle. Déjà au IIIème siècle, l’un des Pères de l’Église, Origène, considéré comme le fondateur de l’exégèse biblique, rejetait sans ambigüité le créationnisme comme étant dénué de sens: https://fr.wikipedia.org/wiki/Orig%C3%A8ne
« Quel est l'homme de sens qui croira jamais que, le premier, le second et le troisième jours, le soir et le matin purent avoir lieu sans soleil, sans lune et sans étoiles, et que le jour, qui est nommé le premier, ait pu se produire lorsque le ciel n'était pas encore ? Qui serait assez stupide pour s'imaginer que Dieu a planté, à la manière d'un agriculteur, un jardin à Éden, dans un certain pays de l'Orient, et qu'il a placé là un arbre de vie tombant sous le sens, tel que celui qui en goûterait avec les dents du corps recevrait la vie ?
« À quoi bon en dire davantage lorsque chacun, s'il n'est dénué de sens, peut facilement relever une multitude de choses semblables que l'Écriture raconte comme si elles étaient réellement arrivées et qui, à les prendre textuellement, n'ont guère eu de réalité. »
— Origène, cité par Lucien Febvre, Le Problème de l'incroyance au XVIe siècle.
Éditions Albin Michel, Paris, 1947, p. 181. http://classiques.uqac.ca/classiques/febvre_lucien/probleme_incroyance_16e/incroyance_16e.html
Pour les catholiques, la « Création» symbolise l’état de finitude des êtres humains dans une relation d’alliance avec l’infini ou l’absolu; elle est perçue comme principe de l’existence plutôt que néant. (1) La relation de dépendance de l’univers et de l’humain à l’égard de Dieu exprime le concept philosophique de contingence. (g) Ainsi, Dieu se présente comme radicalement différent de la nature. (2)
(1) Retrouver la dimension cosmologique de la théologie chrétienne, Jean Proulx, Théologiques 9/1 (2001) 49-70.
(2) Pierre Lathuilière, Le fondamentalisme catholique, Les éditions du Cerf, Paris, 1995, p. 197. https://fr.wikipedia.org/wiki/Cr%C3%A9ationnisme
(g) Gérard Siegwalt précise qu’en langage philosophique, on parlerait ici de la contingence : « Le réel est contingent. Il pourrait ne pas être, mais il se trouve qu'il est. C'est un sujet de constant étonnement. Cet étonnement est la base de la philosophie de l'Antiquité : je pourrais ne pas être ».
Gérard Siegwalt, Dieu est plus grand que Dieu, Les Éditions du Cerf, Paris, 2012, p. 25.
Anne-Marie Pelletier, Exégèse moderne et contemporaine, Collectif, Le grand livre de la théologie, Eyrolles, 2015, p. 82-84.
Georges DUBOUCHER, La science et la foi. Thèmes et exigences d'un dialogue. Coll.
«Le point théologique», n° 51, Paris, Beauchesne, 1988, 131 pages
Petit dictionnaire de théologie catholique, Karl Rahner et Herbert Vorgrimler, Éditions du Seuil, 1970, p. 119 : Il n'est pas douteux, en effet, que l'Ancien et le Nouveau Testament reflètent la représentation mythique du monde qui était celle du milieu dans lequel ils sont nés. […] Mais, ajoute-t-il, » depuis toujours, la théologie faisait une distinction entre le contenu d'une affirmation et le mode de représentation que celle-ci implique, et pour cette raison elle a été toujours, dans un sens vrai, une démythologisation. »
L'objet de la foi, Dieu, se soustrait par nature à l'approche scientifique sous deux rapports : d'abord parce que créateur, il est radicalement différent du monde créé qui s'offre à l'investigation des sciences ; ensuite parce que, dans cette différence créatrice, Dieu se présente d'abord comme radicalement autre pour ceux qui se reçoivent de lui. Il nous faut donc profondément distinguer la science, qui doit gérer une ambition d'objectivité, de la foi religieuse, qui doit gérer l'expérience d'une radicale altérité. Identifier, dans la croyance religieuse, altérité et objectivité, c'est s'exposer à un risque d'idolâtrie]. Pierre Lathulière, p-. 196 et 197
La position des Églises protestantes non fondamentalistes
http://blog.oratoiredulouvre.fr/2015/05/question-la-creation-et-la-theorie-de-l-evolution/
Par ailleurs, le protestantisme n’est pas unifié et ses Églises ont des sensibilités et des théologies différentes, parfois de tendance fondamentaliste. Le protestantisme considère généralement le terme biblique « création » comme un concept théologique (Gounelle) ( Siegwalt ) et philosophique (u ). Paul Tillich, appelle « mythe brisé » le mythe qu’on comprend comme mythe, c’est-à-dire un symbole de ce qui préoccupe l’homme ultimement. Il affirme que « par sa nature même, le christianisme refuse tout mythe non brisé, parce qu'il présuppose le premier commandement : l'affirmation de l'ultime en tant qu'ultime et le rejet de toutes les formes d'idolâtrie quelles qu'elles soient ». On devrait reconnaître, expose-t-il, tous les éléments mythologiques dans la Bible, la doctrine et la liturgie pour ce qu'ils sont, et les maintenir dans leur forme symbolique sans les remplacer par des substituts scientifiques ». Paul Tillich, La dynamique de la foi, Les Presses de l’Université Laval, 2012, p. 56.
( f) Note « La « cause première » n'est pas la cause au sens chronologique, mais elle est la cause au sens du fondement porteur, qui est permanent, qui fonde aujourd'hui tout le réel. Dieu au commencement veut dire : Dieu au fondement des choses. Aujourd'hui il est, il était et il vient. Le Dieu vivant, le Dieu actuel est aujourd'hui le Créateur. La création, la tradition théologique l'a ioujours affirmé, est la création dans sa continuité. » Gérard Siegwalt, Dieu est plus grand que Dieu, Les Éditions du Cerf, Paris, 2012, p. 25.
NOTE u Paul Tillich, Théologie systématique II, L’être et Dieu, Les Presses de l'Université Laval Les Éditions du Cerf, Labor et Fides, 2003, (Édition originale en anglais, The University of Chicago Press, 1951), pp. 65-67. Paul Tillich montre que le terme biblique « création » ne doit pas être compris en terme de causalité ni comme un événement temporel. « La distinction, écrit-il, entre essence et existence qui est, en langage religieux la distinction entre le monde créé et le monde concret, forme la colonne vertébrale de tout le corps de la pensée théologique ». [P. 65] Le passage de l’essence à l’existence ou de la potentialité à la réalité engendre des imperfections, des ruptures et des tensions. Ce qui existe concrètement est le réel, mais l'essence lui fournit son pouvoir d'être, et dans l'essence la plus haute, la potentialité et l'existence concrète s'identifient ». L’auteur explique que le concept d’existence est inadéquat pour discuter de Dieu, parce que ce concept « contredit l'idée d'un fondement créateur de l'essence et de l'existence ». Au plan méthodologique, Dieu ne peut se trouver à l’intérieur de l’ensemble des êtres. « En ce sens, précise Tillich, Dieu est l'être-même au-delà de l'essence et de l'existence. En conséquence, prouver que Dieu existe revient à le nier ».
Paul Tillich soutient que « ce qui concerne l’homme ultimement doit s'exprimer symboliquement parce que seul le langage symbolique a la capacité de dire l'ultime. Dans la religion, le véritable ultime « transcende infiniment le domaine de la réalité finie; aucune réalité finie ne peut donc l'exprimer directement et littéralement. Il considère le mythe ou le symbole comme une forme puissante de langage, qui reste la seule à pouvoir exprimer l’indicible, l’infini ou l’ultime. Id. ( Paul Tillich, Théologie systématique II, L’être et Dieu, Les Presses de l'Université Laval, Les Éditions du Cerf, Labor et Fides, 2003, (Édition originale en anglais, The University of Chicago Press, 1951), pp. 65-67. )
Voir aussi NOTE Werner Heisenberg, l’un des fondateurs de la physique quantique, affirmait que « tout ce qui est de l'ordre de l'esprit, que ce soit dans le langage, dans la science ou dans l'art, repose sur l'intervention et sur la force des symboles. » […] Il précise que l'on « déformerait l'image de cette partie de la réalité si l'on voulait faire passer la force symbolique pour une réalité de second ordre ». Werner Heisenberg, Le Manuscrit de 1942, traduit de l'allemand par Catherine Chevalley, Éditions Allia, Paris, 2010, p. 120 et ss.
http://andregounelle.fr/vocabulaire-theologique/la-creation.php
Pierre Gisel, Lucie Kaennel, La création du monde. Discours religieux, discours scientifiques, discours de foi, Genève-Bienne, Labor et Fides-Société biblique suisse, 1999, 136 p.
Le théologien luthérien Gérard Siegwalt http://www.religion-theologie.fr/gerardsiegwalt/index.html
soutient qu’« on ne doit pas concevoir Dieu comme le « Grand Horloger », « le Grand Architecte de l’univers » : Selon l'authentique conception de la création biblique, pense-t-il, Dieu n'est pas derrière la nature ni avant la nature; il est dans la nature. Ainsi, selon l’auteur, la foi en la création consiste en la prise de conscience du caractère divin, sacré, de la nature. Le Créateur est le Dieu du tout, pour autant qu'il est le fondement ontologique de tout ce qui est, c’est-à-dire la dimension dernière du réel ( g ).
Gérard Siegwalt, Dogmatique pour la catholicité évangélique, tome III, L’affirmation de la foi, Volume 2, Les Éditions du Cerf, Paris, Éditions Labor et fides, Genève, 2000, 428 pages, pp.62-76
2.6 Une hétéronomie de la conscience morale : la soumission aux textes religieux
2.6.1 La position fondamentaliste
Une morale hétéronome (heteros : autre et nomos : loi) est littéralement la loi d’un Autre, c’est-à-dire, Dieu ou ses représentants. Pourquoi agir moralement ? La réponse fondamentaliste est simple : La transcendance le commande ( a) et dicte à l’homme ses normes ( b ) et sa conduite. Cette soumission (0) à la volonté divine est une morale de l’hétéronomie. (1) Elle est associée à une forme de sotériologie selon laquelle selon lequel le salut consiste à éviter la damnation et à obtenir des récompenses ou la béatitude. (2)
(1) David Zeidan, Scripture as God's Revealed Standard and Law: A Comparative Study of Islamic and Christian Fundamentalist Approaches to Scripture, pp. 220-249, p. 222: « Fundamentalists see scriptural revelation as axiomatically true and perfect in every sense, a witness to God's ultimate reality and truth, and an exact record of his revealed will for humanity. All that is left for humans is to accept, submit and obey. […] Because God has revealed himself in scripture and in nature, scripture is to be studied and obeyed as the supreme guide for human behaviour ».
(2) Humans, are, therefore, wholly dependent for their salvation on God's initiative in revelation. p..222 et 223.
http://agora.qc.ca/documents/lethique_chretienne_revisitee
Le théologien et juriste Guy Durand, distingue deux types de morale religieuse, l’une hétéronome et l’autre autonome. ( 3) L’hétéronomie « fait largement appel à l'obéissance des fidèles parce que le précepte est rattaché directement à Dieu par l'intermédiaire des autorités. Il a tendance à être fondamentaliste et conservateur pour la même raison. C'est le modèle adopté généralement par les sectes; on le trouve également dans les courants fondamentalistes de toutes les grandes religions: catholique, protestante, juive, musulmane, hindoue ou autres. Une morale religieuse autonome, au contraire, mise résolument sur l'intelligence humaine ». (4)
(3) Guy Durand, spécialiste en éthique et professeur émérite de l'Université de Montréal, « Une éthique à la jonction de l'humanisme et de la religion. La morale chrétienne revisitée », Fides, 2011, 388 p.
4 Fernand Dumont, sociologue et théologien. Commentaire de l’ouvrage de Guy Durand http://agora.qc.ca/documents/lethique_chretienne_revisitee
C’est pourquoi, écrit Sébastien Fath, « l'autorité normative, qu'elle soit placée dans une tradition, un leader, ou dans un texte, constitue un trait fédérateur pour tous les mouvements religieux radicaux. […] Ainsi, l'idée d'une autonomie individuelle qui puisse se passer de la norme divine apparaît insupportable aux fondamentalistes ». Sébastien Fath, Fondamentalisme.
URL: http://www.universalis.fr/encyclopedie/fondamentalisme/.
( a ) Jean-Claude Ravet, rédacteur en chef de la revue Relations, écrit que pour le fondamentalisme, « la parole n’est qu’un porte-voix d’une Vérité qui impose soumission et obéissance, en deçà de tout questionnement. Le monde, les choses, les êtres, les pensées, les actions, les paroles, les désirs – tout tend à être instrumentalisé, mis au service d’une idée et de sa logique – une idéologie au sens d’Hannah Arendt. Le fondamentalisme religieux n’est qu’une de ses manifestations ». JEAN-CLAUDE RAVET Relations, n° 754, 2012, p. 3. http://id.erudit.org/iderudit/67065ac
( b ) Georges Leroux, « Fondamentalisme et modernité: les trois monothéismes et les impasses de la raison », Horizons philosophiques, vol. 13, n° 1, 2002, p. 71-89.
URI: http://id.erudit.org/iderudit/801225ar DOI: 10.7202/801225ar
« le continuum de la doctrine et de la loi est dans tout fondamentalisme rigoureux, et ce trait montre ce qu'est le fondamentalisme chrétien en particulier, c'est-à-dire la résurgence de la loi dans une doctrine qui s'était posée à l'origine comme une ouverture de la loi ». p. 76
2.6.2 La position de l’Église catholique et des Églises protestantes non fondamentalistes quant à l’hétéronomie de la conscience morale
Selon L’Église catholique et les Églises protestantes non fondamentalistes, le Nouveau Testament insiste sur la primauté de la conscience individuelle : ( g) « Tout ce qui ne se fait pas par conviction est péché » ( Pd ) . Le théologien Luc-Thomas Somme explique la position catholique, exprimée lors du Concile Vatican II (Constitution Gaudium et Spes, no. 16, promulguée par le pape Paul VI) :
« Et s'il arrive qu'elle [la conscience] se trompe de bonne foi, elle ne cesse pas de constituer la norme prochaine impérative de la moralité, en sorte que lui désobéir même en ce cas constitue une faute. Ne pas suivre sa conscience, même erronée, est donc toujours un péché. En revanche, lui obéir quand elle se trompe n'excuse du mal commis ou du bien omis que si l'erreur est en tout point involontaire et elle-même non coupable ». (Luc-Thomas Somme, Le grand livre de la théologie, Eyrolles, Paris, 2008, p. 236).
(g) Cette doctrine est fondée sur l’ensemble du Nouveau Testament, notamment l’épître aux Galates : 3, 10 : « Ceux qui comptent sur l’obéissance à la loi sont frappés d’une malédiction ». 3, 23 : « Avant que vienne le temps de la foi, la Loi [religieuse] nous gardait prisonniers, en attendant que cette foi soit révélée. Ainsi, la loi a été notre surveillant jusqu'à la venue du Christ […]. 5, 14 : « Car toute la Loi se résume dans ce seul commandement : « Tu dois aimer ton prochain comme toi-même. »
( Pd ) Le Petit dictionnaire de théologie catholique la notion de « conscience» […] « est entrée dans les écrits apostoliques du N.T. Mais c'est surtout Paul qui l'a développée » (Romains 2, 14 s. et 14, 23 : « Tout ce qui ne se fait pas par conviction est péché » […] Il en résulte que les commandements « ne peuvent être présentées à l'homme que par l'intermédiaire du jugement personnel de sa conscience, ce qui fait que ce jugement de la conscience a un caractère absolument obligatoire pour les décisions de l'homme. » Karl Rahner et Herbert Vorgrimler, Petit dictionnaire de théologie catholique, Éditions du Seuil, 1970, p. 92
La notion chrétienne de « commandement » dérive du judaïsme sans conserver le même sens. Le sociologue des religions Sébastien Fath, écrit que « l’autonomie de la conscience morale est un trait essentiel de la rupture [du christianisme] avec le judaïsme. Elle n’est pas aperçue ou acceptée par les fondamentalistes. » (Voir la citation ci-dessus de Sébastien Fath, Le fondamentalisme). En christianisme, le « commandement » prend un sens particulier parce qu’il doit céder le pas devant le jugement de la conscience droite. C’est pourquoi l’Église catholique, se fondant sur le Nouveau Testament ( g ), considère les « commandements » (de Dieu ou de l’Église) comme « un appel à l’amour et à la liberté » et une « forte recommandation » ( )
Glossaire de l’Église catholique
http://www.eglise.catholique.fr/glossaire/commandements/ :
De même, le philosophe non croyant Luc Ferry considère que le christinisme est « une religion de l’esprit plus que de la lettre, une religion de la conscience et de la liberté intérieures » ( ) , ce qui a permis le passage à la laïcité ( LF ).
( LF ) Dans une analyse de l’Évangile de Jean, le philosophe non croyant Luc Ferry est d’avis que « le christianisme est une religion de l’esprit plus que de la lettre, une religion de la conscience et de la liberté intérieures plus que de l’observance littérale et mécanique des règles de vie ». La tradition veut qu’on lapide la femme adultère ? En toute circonstance, la première place doit revenir au forum intérieur, à ce lieu de délibération de soi avec soi que l’on appelle la conscience morale (p. 93). […] On peut lire et relire l’Évangile de Jean tant qu’on voudra, on n’y trouvera rien qui impose des obligations extérieures. […] (p. 94).
Enfin, le théologien protestant Paul Tillich affirme que « l'hétéronomie représente, en général, une réaction contre une autonomie ayant perdu sa profondeur, devenue vide et impuissante. Mais, en tant que réaction, elle est destructrice, car elle refuse à la raison le droit à l'autonomie et en démolit du dehors les lois structurelles. » (Til)
( Til) p. 121 et 122. Ce théologien et philosophe croit plutôt en une rencontre de la volonté humaine et de la volonté divine, dans une alliance ; ce qui évoque le prophète Jérémie 31, 33 : « Mais voici en quoi consistera l’alliance que je conclurai […]: j’inscrirai mes instructions non plus sur des tablettes de pierre, mais dans leur conscience; je les graverai dans leur cœur; »
2.7 Une hétéronomie de la conscience politique: la soumission aux autorités civiles
2.7.1 La position fondamentaliste
Le « Fundamentalism Project » contient une étude de Pablo A. Deiros portant sur le fondamentalisme protestant en Amérique latine; il se réfère à l’épître de Paul aux Romains pour expliquer la conscience politique hétéronome des fondamentalistes. (1)
Pablo A. Deiros, professeur de théologie, Californie, Protestant Fundamentalism in Latin America. Collectif. Fundamentalisms Observed, Volume I. Édité par Martin E. Marty et R. Scott Appleby, The American Academy of Arts and Sciences, The University of Chicago Press, 1991, Chicago, London, pp. 142-196. Pablo Deiros est à l’Université de Californie.
« Que chacun se soumette aux autorités en charge. Car il n'y a point d'autorité qui ne vienne de Dieu, et celles qui existent sont constituées par Dieu. Si bien que celui qui résiste à l'autorité se rebelle contre l'ordre établi par Dieu. Et les rebelles se feront eux-mêmes condamnés. […] Veux-tu n'avoir pas à craindre l'autorité ? […] elle est un instrument de Dieu pour faire justice et pour châtier qui fait le mal. Aussi doit-on se soumettre non seulement par crainte du châtiment, mais par motif de conscience ». (Épître de Paul aux Romains, 13, 1-6.)
Lu hors contexte et sans méthode historico-critique, des Églises fondamentalistes enseignent que l’une des fonctions de la religion consiste à justifier et solidifier l'ordre politique, soit le « théologico-politique ». Pourquoi obéir à la loi ? Parce que tout pouvoir vient de la transcendance (1) Ainsi, selon le professeur Pablo A. Deiros, le fondamentaliste cultive un état d’esprit voulant que toutes les autorités soient instituées par Dieu. Et il croit que Dieu remplacera les autorités qui ne pratiquent pas la justice. Voir aussi (j)
Note : P. 174. ( j) )
( 1 ) Pablo A. Deiros, professeur de théologie, Université de la Californie, Protestant Fundamentalism in Latin America. Collectif. Fundamentalisms Observed, Volume I. Édité par Martin E. Marty et R. Scott Appleby, The American Academy of Arts and Sciences, The University of Chicago Press, 1991, Chicago, London, pp. 142-196.
( j) Selon Jean-Claude Ravet, rédacteur en chef de la revue Relations, ce qui caractérise le fondamentalisme, c’est « une fermeture du sens. Sa négation en quelque sorte. Un repli dans la certitude, au-delà de la croyance. La recherche d’un pouvoir contrôlant et d’une sécurité rassurante et fantasmée, qui esquive la liberté et la responsabilité à l’égard du monde et court-circuite le jugement critique. […] Sans interprétation. La parole n’est qu’un porte-voix d’une Vérité qui impose soumission et obéissance, en deçà de tout questionnement. ». Jean-Claude Ravet « Sur le danger du fondamentalisme » Relations, n° 754, 2012, p. 3. http://id.erudit.org/iderudit/67065ac
2.7.2. La position catholique et celle des Églises protestantes non fondamentalistes : l’autonomie de la conscience politique
L’Église catholique et les Églises protestantes non fondamentalistes soutiennent qu’on doit rechercher l'intention de l'auteur par le contexte historique, l'ensemble des textes connexes, le genre littéraire et accorder une grande importance au sens spirituel. (voir note ) Selon ces Églises, l’épître de Paul aux Romains, 13, 1-6, qui demande une soumission aux autorités de Rome fut un appel au respect de la loi, adressée aux premiers chrétiens de Rome dans un contexte de persécutions. On ne saurait en faire une norme applicable pour toute l'humanité, en toutes circonstances et à toute époque. ( ) Le théologien Pablo Deimos indique que le sens spirituel est révélé par Romains 13, 8 : « Celui qui aime les autres a obéi complètement à ce qu’ordonne la loi. ». vérifier la page ( ) Émile Poulat, École des Hautes Études en Sciences, sociales (Paris), Comment lire la Bible, pp. 217-234, dans Les retours aux Écritures. Fondamentalismes présents et passés. Édité par Évelyne Patlagean et Main Le Boulluec, Peeters, Louvain et Paris, 1993.
(4) Jean-Louis Schlegel, La loi de Dieu, contre la liberté des hommes, Intégrismes et fondamentalismes, Seuil, 2003.
2.8 Millénarisme et fondamentalisme apocalyptique
2.8.1 La position fondamentaliste
Le millénarisme est une position minoritaire dans l’éventail du fondamentalisme protestant. Ses défenseurs croient avoir découvert des vérités oubliées depuis très longtemps concernant le sens caché des prophéties bibliques, lesquelles seront bientôt accomplies.
Le pré-millénarisme est la croyance que le mal le monde de plus en plus et que Jésus viendra pour emporter avec lui les vrais croyants. Puis, il y aura sept années de grandes tribulations où régnera l'Antéchrist. Jésus reviendra ensuite gouverner la terre pendant mille ans. Les post-millénaristes croient plutôt que le monde continuera à progresser et que le bien l’emportera sur le mal.
Le dispensationalisme présente une vision de l'histoire du salut qui divise l’histoire en sept dispensations ou « attitudes» de Dieu face à l'humanité. Le dispensationalisme situe les vrais croyants avant la septième dispensation, le moment où le Christ soustraira son Église invisible aux malheurs et tribulations du monde. Ces croyances détournent le sens spirituel des textes pour se fonder sur un biblicisme littéraliste.1 Pierre Lathuilière y décèle un « mal d’être au monde », p.19, 20 et 292 à 297.
2.8.2 La position non fondamentaliste
Les Églises non fondamentalistes rejettent ces doctrines, même si Pierre Lathuilière remarque une « surchauffe eschatologique » parmi certains de leurs adeptes.1 1 Pierre Lathuilière, p.
2.9 La dénonciation du dialogue inter-religieux
2.9.1 La position fondamentaliste
Le fondamentalisme refuse généralement le dialogue avec des doctrines différentes. Comme il soupçonne les autres croyants de n’être pas convertis, il refuse l’œcuménisme car il craint toute compromission avec eux. (1) Il ne voit aucune raison de chercher un dialogue avec des gens qui ne sont pas vraiment chrétiens. (2)
(1) Pierre Lathuilière, Le fondamentalisme catholique, Les éditions du Cerf, Paris, 1995, p. 259.
(1) Niels C. Nielsen, Jr., Fundamentalism, Mythos, and World Religions, State University of New York Press, 1993, p. 2 : « Christian fundamentalism is identified in the European study as a phenomenon directed: […] 4. against every syncretism as seen in ail interreligious dialogue, in ecumenics, and (secularly) in the League of Nations and the United Nations ».
(2) James Barr « Les gens que d'autres appellent "fondamentalistes" se pensent eux-mêmes et voudraient s'appeler eux-mêmes simplement "chrétiens" ou "vrais chrétiens" : c'est là la véritable perception qu'ils ont d'eux-mêmes. Pour cette raison, toute désignation plus restreinte leur déplaît. Ils veulent penser leur propre position comme la ou la seule position chrétienne ». (1)
James Barr, Fundamentalism, p. 9, cité et traduit par Pierre Lathuilière, Le fondamentalisme catholique. Signification et ecclésiologie, Cerf, Paris, 1995, p. 56.
2.9.2 La position de l’Église catholique et des Églises protestantes non fondamentalistes
L’œcuménisme (lien) est un mouvement interconfessionnel, né en milieu protestant, qui tend à promouvoir des actions communes entre les divers courants du christianisme, en dépit de leurs différences doctrinales, avec pour objectif l’unité visible de l’Église. (1). En 2013, Conseil Œcuménique des Églises comprenait 345 Églises, dénominations et communautés d’Églises de 120 pays, représentant plus de 500 millions de chrétiens répartis à travers le monde.
https://fr.wikipedia.org/wiki/%C5%92cum%C3%A9nisme
Selon l’Église catholique, l’oecuménisme désigne « l’effort des chrétiens pour parvenir à une unité institutionnelle entre les différentes Églises et communautés qui le composent aujourd’hui. 1 L’Église catholique ne rejoignit officiellement le mouvement pour l’unité des chrétiens qu’en 1964, lors du Concile Vatican II. (2)
https://www.oikoumene.org/fr/about-us
https://fr.wikipedia.org/wiki/Conseil_%C5%93cum%C3%A9nique_des_%C3%89glises
2.10 Le fondamentalisme catholique
Voir p. 302, 303
L’Église catholique dénonce officiellement le fondamentalisme, particulièrement le fondamentalisme biblique.
Dans son glossaire, l’Église catholique donne la définition suivante du fondamentalisme : « radicalisme religieux qui se réfère à une lecture littérale des textes sacrés sans tenir compte de la culture dans laquelle furent écrits les livres de l’Ancien et du Nouveau Testaments. Le fondamentalisme exclut toute approche critique, pourtant nécessaire, des textes fondateurs ». De plus, le catholicisme américain a publié toute une littérature apologétique au milieu des années 1980 pour combattre le fondamentalisme chrétien.
POULAT Émile, Église contre bourgeoisie. Introduction au devenir du catholicisme actuel, Paris, Casterman, coll. « Religion et sociétés », 1977
Même si le catholicisme est loin d’être homogène, l’autorité de Rome lui permet une certaine cohésion doctrinale (1), ce qui n’empêche pas le fondamentalisme d’influencer une partie de ses adeptes. (z)
( 1) http://www.vatican.va/roman_curia/congregations/cfaith/index_fr.htm
( z) JOHN A. COLEMAN, S.J, Cathofic Integralism as a Fundamentalism, in Kaplan, Lawrence, Editor, Fundamentalism in Comparative Perspective, The University of Massachussets Press, 1992, pp. 74-95.
En effet, le sociologue Émile Poulat observe que « le fondamentalisme trouve aujourd’hui, dans les milieux catholiques plus de connivences qu’on ne l’imagine». (1) Église contre bourgeoisie. Introduction au devenir du catholicisme actuel, Paris, Casterman, coll. ««Religions et sociétés», 1977, p. 213-226. Voir aussi Pierre Lathuilière, Le fondamentalisme catholique. Signification et ecclésiologie, Cerf, Paris, 1995, 334 p., p. 24.
En raison de son organisation ecclésiale hiérarchisée, le catholicisme devrait échapper au fondamentalisme mais paradoxalement, il y succombe lorsqu’il absolutise la papauté et les dogmes. ( Baubérot ) Arkoun Mohammed, Baubérot Jean, Drai Raphaël, Smyth-Florentin Françoise. Débat avec Mohammed Arkoun, Jean Baubérot, Raphaël Drai et Françoise Florentin-Smyth. In: Autres Temps. Les cahiers du christianisme social. N°38, 1993. pp. 64-77. http://www.persee.fr/doc/chris_0753-2776_1993_num_38_1_1585 p. 74-75 Jean Baubérot, sociologue des religions, s’exprime ainsi : « […] l'accès au fondamental semble devoir être toujours indirect, « médiatisé » soit par la Tradition, soit par une institution hiérarchisée. Par là, le catholicisme devrait échapper au fondamentalisme. Mais — et voilà le paradoxe — s'il existe effectivement un fondamentalisme dans le catholicisme, il porte justement sur la médiation, tout particulièrement sur l'autorité survalorisée. Cela entraîne alors une papolâtrie, l'attente
Selon Pierre Lathuilière, si l'on analyse le conservatisme catholique français après Vatican II sous la loupe du fondamentalisme, on peut constater qu'il se diversifie selon au moins trois courants : intégriste, piétiste et charismatique. Le courant intégriste, le plus connu, cherche à « faire l'expérience de la Tradition ». P.L.. p. 66. Il s’apparente au catholicisme traditionaliste en ce qu’il absolutise radicalement la Tradition et les dogmes, lesquels sont considérés comme le fondamentalisme protestant conçoit les Écritures. La réintégration de Mgr. Lefebvre montre bien sa présence au sein du catholicisme, même si elle reste marginale. Pierre Lathuilière note qu’on observe dans ce milieu une vigoureuse reprise des thèses créationnistes, enrichies par l'antiévolutionnisme américain. Selon lui, des traditionalistes catholiques ont vu dans le retour des partisans de Mgr. Lefebvre « une force d'appoint dans leur lutte contre le modernisme ». Pierre L, P. 67
Une deuxième courant, piétiste, est sensible à l’expérience de la conversion. Pierre Lathuilière, note que devant la sécularisation, ce courant piétiste oscillera entre apologétique et fidéisme. p. 66 Le troisième courant, charismatique, est venu des États-Unis après le Concile. Il s’apparente au pentecôtisme mais n’est pas nécessairement fondamentaliste ni même conservateur. De ce point de vue, selon pierre Lathuilière, il apparaît aussi riche en potentialités diverses que les autres formes d'évangélicalisme. Toutefois, dans certaines communautés, il pourra devenir comparable aux Réveils (Revivals) du fondamentalisme protestant, à forte dose émotionnelle. ( Ch )
William D. Dinges et James Hitchcock, Roman Catholic Traditionalism and Activist Conservatism in the United States. Collectif. Fundamentalisms Observed, Volume I. Édité par Martin E. Marty et R. Scott Appleby, The American Academy of Arts and Sciences, The University of Chicago Press, 1991, Chicago, London, pp. 66-141.
(Ch) Danièle Hervieu-Léger, La pratique de la lecture spontanée des textes scripturaires dans le renouveau charismatique catholique, dans Évelyne Patlagean et Main Le Boulluec. Les retours aux Écritures. Fondamentalismes présents et passés. Éd. Peeters, Louvain-Paris, 1993, 399 pages, p. 47.
que l'autorité se prononce sur tout, élimine les oppositions ».
3. Les positions du fondamentalisme athée au sujet du christianisme
3.1 Radicalisme et hostilité envers les religions et la théologie du XXème siècle
3.2 Le refus du doute méthodologique : lecture au premier degré et inerrance de la Bible 3.3 L’explication de causes naturelles par des causes surnaturelles 3.4 L’hétéronomie morale : la soumission aux textes religieux 3.5 L’hétéronomie religieuse de la conscience politique: la soumission aux autorités civiles 3.6 Le millénarisme et l’eschatologie
3. Les positions du fondamentalisme athée au sujet du christianisme
L’expression « fondamentalisme athée » est consacrée par l’usage, (1.1 ) bien que certains auteurs préfèrent employer le mot « sécularisme » dans un cadre spécialisé. (note 2) En anglais, les expressions « atheist fundamentalism », « secular fundamentalism et parfois « secularism » (0.1) sont employés indifféremment et sont d’usage courant. ( 2.1)
(note 2) Le mot « sécularisme » ne figure ni dans le Dictionnaire Larousse (consulté le consulté le 9 février 2016) ni dans le Petit Robert (consulté le 9 février 2016). De plus, ce mot présente l’inconvénient d’être confondu avec le mot « sécularité », voisin du mot « laïcité » qui est pourtant contraire au fondamentalisme. ( 0.2 ) Pour ces raisons, l’expression « fondamentalisme athée », comprise du public (2.1), est la plus utilisée. Elle est également justifiée par le fait que les principales caractéristiques de ce phénomène sont symétriquement corrélées à celles du fondamentalisme chrétien. De plus, non seulement des athées radicaux sont reconnues comme « fondamentalistes athées (zz), mais on retrouve un athéisme radical qui s’identifie lui-même comme un « fondamentalisme athée » (z); Par contre, d’autres athées refusent la pertinence de cette appellation au motif que l’athéisme n’est pas une religion ni même une croyance mais plutôt une certitude fondée sur la science. ( x) (y)
(0.1) http://www.theguardian.com/commentisfree/2007/jan/06/comment.religion1
(2.1 ) - The Urban Dictionary / Secular fundamentalism, http://www.theguardian.com/commentisfree/2007/jan/06/comment.religion1
(0.2) Le fondamentalisme athée est également contraire au concept de laïcité. Voit : Office québécois de la langue française, Le grand dictionnaire terminologique.
http://gdt.oqlf.gouv.qc.ca/ficheOqlf.aspx?Id_Fiche=8991758
« La laïcité, loin d'être hostile aux opinions particulières, constitue le ciment capable d'unir les hommes au-dessus des barrières idéologiques qui pourraient les séparer ».
(z) 2 Brian Keith Dalton, Atheist Fundamentalist, A Comparaison of Atheist Fundamentalist and Religious Fundamentalism, https://www.patreon.com/posts/way-of-mister-2046431
(x) A. C. Grayling, Can an atheist be a fundamentalist? http://www.theguardian.com/commentisfree/2006/may/03/cananatheistbeafundamenta
(y) Austin Cline, Definition of Fundamentalist Atheist, About.com http://atheism.about.com/od/Atheist-Dictionary/g/Definition-Fundamentalist-Atheist.htm
( 2.2 ) - Atheist Fundamentalism and the Limits of Science
(2.3 ) Michael Egnor October 30, 2007 4:36 PM | Permalink http://www.evolutionnews.org/2007/10/fundamentalism_and_dr_forrest004411.html
(zz) Frank Pasquale, professeur à l'université du Maryland. "Secularism & Secularity: Contemporary International Perspectives". Hartford, CT: Institute for the Study of Secularism in Society and Culture (ISSSC), 2007. p.46. "Some self-identified Atheists consequently distinguish between "positive" and "negative" forms. […] But there are also notes of irreligious sectarianism. In a meeting of secular humanists, one audience member proclaims, "We have our fundamentalists, too. They’re called Atheists." In an Atheist meeting across town, derisive asides make reference to "a lack of spine" or "going soft onreligion" among "the humanists."
Le professeur Harris Harriet est d’avis que la détermination des caractéristiques du fondamentalisme relève de l’épistémologie : il n’existe aucune raison, observe-t-il, de réserver cette appellation aux mouvements religieux.
(61) Harriet A. Harris, How Helpful Is the Term ‘Fundamentalism’, Fundamentalisms, Paternoster Press, 200, p. 14: « A discipline that could be usefully employed to identify fundamentalist distinctives is philosophy, and, in particular, epistemology. […] Fundamentalists appeal to a foundation that must be true absolutely (in a totally unconditioned way). There is no reason, within this philosophical account, to reserve Fundarnentalism for religious movements ».
Ainsi, tout en se disant lui-même athée, le physicien Peter Higgs, prix Nobel, a dénoncé « le fondamentalisme athée » lorsque le biologiste Richard Dawkins a cherché à utiliser sa découverte du boson éponyme pour en faire une apologie de l’athéisme. ( ) L’attitude de celui-ci lui apparaît comme une autre forme de fondamentalisme: « Je ne suis pas contre les gens religieux, a dit Peter Higgs, sauf s’ils se comportent comme des fanatiques extrémistes. Le problème de Dawkins, provient du fait qu’il concentre toutes ses attaques contre les fondamentalistes, mais évidemment ce ne sont pas tous les croyants qui le sont. Dans ce sens, je crois que Dawkins finit par adopter une attitude fondamentaliste, dans l'extrême opposé ». Richard Dawkins répliqua qu’il est passionné autant que les fondamentalistes, mais qu’il peut changer d’idée, tandis que les fondamentaliste en sont incapables.
https://www.theguardian.com/science/2012/dec/26/peter-higgs-richard-dawkins-fundamentalism
El Mundo, 03/01/2013, Espagne,
http://www.elmundo.es/elmundo/2012/12/27/ciencia/1356611441.html
In the El Mundo interview, Higgs argued that although he was not a believer, he thought science and religion were not incompatible.
The Guardian, London U. K., « Peter Higgs criticises Richard Dawkins over anti-religious 'fundamentalism' ». http://www.theguardian.com/science/2012/dec/26/peter-higgs-richard-dawkins-fundamentalism
https://en.wikipedia.org/wiki/Fundamentalism#Atheist
Le professeur Simon Watson de l’Université de Toronto, Canada, souligne que Richard Dawkins utilise la même rhétorique que celle des fondamentalistes religieux. Il exprime, ajoute-t-il, un dualisme sans nuances, déforme les faits et simplifie à outrance des réalités complexes. Simon Watson conclut que les fondamentalismes religieux et athées sont interdépendants. Note 3 Richard Dawkins' The God Delusion and Atheist Fundamentalism by Simon Watson, published in Anthropoetics XV,2 Spring 2010 http://www.anthropoetics.ucla.edu/ap1502/1502Watson.htm
Le sociologue William Stahl de l’Université de Régina, Canada, se dit frappé par le nombre important des observations qui dépeignent le Nouvel athéisme comme le portrait miroir du fondamentalisme religieux; selon lui, ces deux phénomènes ont une structure et une épistomologie parallèles. Il explique leur parallélisme par leur tentative commune de recréer une autorité crédible face à la crise de sens de la modernité récente. 132
132 William Stahl (2010). "One-Dimensional Rage: The Social Epistemology of the New Atheism and Fundamentalism". In Amarnath Amarasingam. Religion and the New Atheism A Critical Appraisal. Haymarket Books. pp. 97–108. ISBN 978-1-60846-203-2.
Le fondamentalisme athée reprend à son compte les mêmes positions que le fondamentalisme chrétien mais dans le seul but d’en montrer la fausseté, voire le ridicule, et il les assimile d’emblée à celles des grandes Églises chrétiennes non fondamentalistes. (2) (3) Les principales caractéristiques du fondamentalisme athée sont donc symétriquement corrélées à celles du fondamentalisme chrétien. ( ) La présente section propose de décrire cette symétrie.(4)
(4) Le sociologue William Stahl de l’Université de Régina, Canada, se dit frappé par la fréquence importante des observations où le Nouvel athéisme est dépeint comme le portrait miroir du fondamentalisme religieux par leur symétrie; selon lui, ces deux phénomènes ont une structure et une épistomologie parallèles. Il explique cela par leur tentative commune de recréer une autorité face à la crise de sens de la modernité récente.
132 William Stahl (2010). "One-Dimensional Rage: The Social Epistemology of the New Atheism and Fundamentalism". In Amarnath Amarasingam. Religion and the New Atheism A Critical Appraisal. Haymarket Books. pp. 97–108. ISBN 978-1-60846-203-2.
Professors of philosophy and religion, Jeffrey Robbins and Christopher Rodkey, take issue with "the evangelical nature of the new atheism, which assumes that it has a Good News to share, at all cost, for the ultimate future of humanity by the conversion of as many people as possible." They find similarities between the new atheism and evangelical Christianity and conclude that the all-consuming nature of both "encourages endless conflict without progress" between both extremities.[131] Sociologist William Stahl notes "What is striking about the current debate is the frequency with which the New Atheists are portrayed as mirror images of religious fundamentalists." He discusses where both have "structural and epistemological parallels" and argues that "both the New Atheism and fundamentalism are attempts to recreate authority in the face of crises of meaning in late modernity."[132]
(4) «Le vide des sociétés modernes, écrit Dominique Schnapper, laisse à l'individu la possibilité, la charge, le privilège et l'angoisse de choisir le sens qu'il veut donner à son existence 10. » E). Schnapper, «Le sens de l'ethnico-religieux», Archives des sciences sociales des religions, no 81, janvier-mars 1993, p. 149-163. À la p. 157
(2) Daniel Baril, 7 novembre 2014, Journal Voir. L’auteur, un militant athée, explique longuement que « la position du Vatican n’est rien d’autre que du « créationnisme évolutionniste » à mi-chemin entre le créationnisme biblique et le dessein intelligent. ».
http://voir.ca/daniel-baril/2014/11/07/le-pape-fait-de-lantiscience-avec-le-bigbang-et-levolution/
En effet, il reprend à son compte l’une ou l’autre des caractéristiques du fondamentalisme chrétien: un radicalisme intolérant envers les convictions opposées, véhiculées par les religions; une hostilité ou une indifférence à l’égard de la théologie du XXème siècle; une critique sélective ne valorisant pas le doute et laissant toute la place à une pensée unique; l’imputation aux religions d’une explication surnaturelle de théories scientifiques, l’attribution au christianisme en général d’une surchauffe eschatologique du fondamentalisme religieux; et un exclusivisme qui le sépare du reste du monde. Ces similitudes sont discutées dans les paragraphes suivants
3.1. Radicalisme et hostilité envers les religions
Le sociologue Sébastien Fath souligne qu’une « des caractéristiques générales du fondamentalisme religieux est l'intolérance. (11 ) De même, le fondamentalisme athée se présente lui-même comme un prosélytisme (q), une doctrine radicalement anti-théiste et fortement anti-chrétienne : Les auteurs Richard Dawkins, Daniel Dennett, Sam Harris, Christopher Hitchens et Victor J. Stenger ont initié au XXIème siècle un courant de pensée qu’ils ont appelé « Nouvel athéisme » qui s’apparente au fondamentalisme athée par son radicalisme et son intolérance envers les religions. Ils affirment que « la religion ne devrait pas être simplement tolérée mais devrait être contrée, critiquée, et exposée à des arguments rationnels à chaque fois qu'elle apparait ».
11) voir Guy Morant en bas
Le Nouvel athéisme repose sur des réseaux plus ou moins organisés, dont le « Mouvement des Brights ». Ainsi, l’auteur Claude M. J. Braun, qui en est membre, affirme ceci: « Ce Nouvel athéisme est nettement hostile à la croyance religieuse ». Braun, Claude, Québec athée, Les éditions Michel Brûlé, Montréal, 2010, p. 87
https://en.wikipedia.org/wiki/Criticism_of_atheism#New_Atheism
Guy Morant, Agora Vox, 13 novembre 2006, La croisade des Nouveaux athées, http://www.agoravox.fr/actualites/religions/article/la-croisade-des-nouveaux-athees-15559 Ainsi, Guy Morant est d’avis que « le Nouvel athéisme, en déclarant la guerre aux religions, en appelle à une véritable croisade des sans-dieu, avec tout ce que cela comporte d’extrémisme et d’intolérance ».
Le fondamentalisme athée favorise un prosélytisme actif (h), refuse le plus souvent tout dialogue constructif avec les religions (u) et, comme les autres fondamentalismes, il se décline presque toujours sur fond conflictuel. (1)
(h) Skye Jethani, What Evangelicals and Atheists Have in Common, The Huffington Post, 06/23/2010. http://www.huffingtonpost.com/skye-jethani/what-evangelicals-and-ath_b_549775.html
(u) Robert J. Deltete, Seattle University, « John F. Haught God and the New Atheism: A Critical Response to Dawkins, Harris, and Hitchens ». Philosophy in Review XXX (2010), no. 6.
(1) Pierre Lathuilière, Le fondamentalisme catholique, Les éditions du Cerf, Paris, 1995, p. 12. http://www.erudit.org/revue/crs/1998/v/n30/1002659ar.pdf « Religion et intégrisme, ou les paradoxes du désenchantement du monde » Micheline Milot Cahiers de recherche sociologique , n° 30, 1998, p. 153-178. Pour citer cet article, utiliser l'information suivante : URI: http://id.erudit.org/iderudit/1002659ar DOI: 10.7202/1002659ar Le fondamentalisme religieux, « se décline presque toujours sur fond conflictuel ». en ce sens, le fondamentalisme athée n’est pas différent.
(1) Richard Dawkins, Pour en finir avec Dieu, (The God Delusion), Pour en finir avec dieu, Éditions Perrin, 2009. Par exemple, Richard Dawkins se prémunit contre toute possibilité de dialogue lorsqu’il reprend en son nom l’affirmation suivant laquelle « quand une personne souffre de délire, on appelle cela de la folie. Quand un grand nombre de personnes souffrent de délire, on appelle cela une religion ». https://fr.wikipedia.org/wiki/Pour_en_finir_avec_Dieu
Pourtant, l’athéisme n’est pas nécessairement antichrétien : Le philosophe André Comte-Sponville, matérialiste au sens philosophique, n’hésite pas à se définir comme un « athée fidèle » à la tradition chrétienne. (note b) De même, la pensée agnostique d’Albert Camus présentait des convergences substantielles avec le christianisme. (c) Il en est de même de celle du philosophe Luc Ferry. ( )
(b) André Comte-Sponville, L’esprit de l’athéisme, Éditions Albin Michel, 2006, p. 9 : « Un combat contre la religion? Ce serait se tromper d'adversaire. Mais pour la tolérance, pour la laïcité, pour la liberté de croyance et d'incroyance. L'esprit n'appartient à personne. La liberté non plus ». Et à la page 10 : « J'ai horreur de l'obscurantisme, du fanatisme, de la superstition. Je n'aime pas davantage le nihilisme et la veulerie. La spiritualité est une chose trop importante pour qu'on l'abandonne aux fondamentalistes ».
( c ) François Chavanes, « Albert Camus, un message d’espoir », Les Éditions du Cerf, Paris, 1996, p. 47 : «Dès son premier cycle littéraire1, Albert Camus exprima, dans ses écrits, des aspirations humaines qui sont en convergence avec le christianisme. […] Mais c'est surtout après son engagement dans la Résistance, et donc à partir de son second cycle littéraire, que Camus proposa une conduite humaine qui, dans la pratique, se rapproche de la conduite chrétienne ».
3.2. Le refus du doute méthodologique et existentiel.
3.2.1 Refus ou ignorance de la théologie du XXème siècle
Le philosophe Robert J. Deltete, professeur à l’Université de Seattle, soutient que les « nouveaux athées » Richard Dawkins, Sam Harris et Christopher Hitchens sont superficiels au plan philosophique et ignorants au plan théologique, et ils n’ont qu’une très faible compréhension de ce qu’ils rejettent. Leurs propos visent les adeptes du littéralisme biblique, mais esquivent la philosophie de Pierre Teilhard de Chardin ou celle de Paul Tillich. (v)
(v) Robert J. Deltete, Seattle University, Philosophy in Review Vol. 30, 2010, no. 6, p. 404-407 http://journals.uvic.ca/index.php/pir/issue/view/327 « John F. Haught God and the New Atheism: A Critical Response to Dawkins, Harris, and Hitchens ». Philosophy in Review XXX (2010), no. 6 : « The new atheists are philosophically superficial, which Haught mentions but does not stress. They are also theologically ignorant […] the new atheists either ignore theology or have only the most superficial understanding of what they summarily reject ». Robert J. Deltete rejoint ainsi la critique du professeur John F. Haught.
(q) God and the New Atheism: A Critical Response to Dawkins, Harris, and Hitchens. Louisville, KT: Westminster John Knox Press 2008.
De même, le professeur Simon Watson a étudié la position exprimée l’ouvrage The God Delusion de Richard Dawkins : Ce dernier, selon Watson, considère que toute la réalité peut recevoir une explication scientifique, y compris la question de Dieu, lequel devient ainsi un objet parmi les autres. (1) ( J.P.II) Richard Dawkins prétend que la théologie n’a pas évolué en 18 siècles et selon le professeur Watson, non seulement montre-t-il son ignorance à l’égard des questions religieuses, mais il s’appuie entre autres sur les écrits d’un pasteur reconnu comme fondamentaliste. En somme, conclut Simon Watson, Richard Dawkins considère la théologie comme un sujet sans objet (« non-subject about nothing » ).
1 He notes that "the existence of God is a scientific hypothesis like any other"; "Either he exists or he doesn’t. It is a scientific question; one day we may know the answer" (48, 50). Thus, Dawkins’s God is of the empirical declarative, what Gans defines in its most general terms as "a predication about a topic" (Language 170). Writes Andrew Bartlett, "such a scientist wants to confine the being of God to the space of the grammatical subject of a proposition that can be falsified, verified, tested, disproved. He wants God to be a ‘thing’ either on or off the scene of representation" (6).
2 But Dawkins is deaf to theology, which he regards as a non-subject (56-57). This deafness is seen in his claim that theology "has not moved on in eighteen centuries," as well as in his attacks on long-dead thinkers like Thomas Aquinas, St. Augustine, Anselm of Canterbury, Teresa of Avila, Martin Luther and Moses Maimonides (34). The number of living professional theologians to which he refers is limited to Arthur Peacocke, Russell Stannard, John Polkinghorne, Keith Ward, Richard Swinburne, and John Shelby Spong (99, 237). But even here there is little to no engagement with their ideas or those of any other twentieth or twenty-first-century theologian, outside of fundamental right-wing pastors like "Pastor Ted" (319).
Anthropoetics 15, no. 2 (Spring 2010)
Review Essay: Richard Dawkins’ The God Delusion and Atheist Fundamentalism
Simon Watson Volume XV, number 2 (Spring 2010)
ISSN 1083-7264 URL: http://www.anthropoetics.ucla.edu/ap1502/
Ainsi, les auteurs fondamentalistes, qu’ils soient chrétiens ou athées, préfèrent passer sous silence les grandes révolutions de la théologie moderne (m) et ne citent jamais les théologiens les plus reconnus du XXème siècle, comme Paul Tilllich, Karl Barth, Dietrich Bonhoeffer, Rudolf Bultmann, Jürgen Moltmann ou Albert Schweitzer chez les protestants, ou encore Gustavo Gutiérrez Merino, Charles de Foucauld, Edith Stein, Pierre Teilhard de Chardin, Maurice Zundel ou Karl Rahner, chez les catholiques. (n)
( m)
François BOUSQUET et al., directeur., Les grandes révolutions de la théologie moderne. Paris, Bayard, 2003, 310 p.
3.2.2 Refus du doute méthodologique : une lecture hors contexte, au premier degré, et l’inerrance de la Bible
L'exégète Sophie Raymond affirme ceci : « Se passer de l'approche historique et critique, c'est risquer de laisser dire n'importe quoi. [...] L'approche historico-critique évite les pièges du fondamentalisme ».
Sophie Raymond, Tendances actuelles de l’exégèse.
http://www.assomption.org/fr/spiritualite/saint-augustin/revue-itineraires-augustiniens/lire-avec-les-yeux-du-coeur/iv-augustin-aujourd-hui/tendances-actuelles-de-l2019exegese-par-sophie-ramond
Selon le théologien Alain Thomasset, « comme dans le fondamentalisme, l’erreur séculariste refuse d’entrer dans un dialogue et un travail d’interprétation vis-à-vis de l’Écriture. […] ». p. 132 d) Alain Thomasset, Introduction à l'éthique, Penser, croire, agir. Dans Jean-Daniel Causse et Denis Müller, Les Editions Labor et Fides, 2009, 680 pages, p. 132. ISBN: 978-2-8309-1362-0
Le refus d’accepter la méthode scientifique historico-critique est expliqué par Luc Chartrand : « Mais les adeptes de la lecture fondamentaliste se nourrissent d'un discours antérieur, c'est-à-dire préconçu, à Ia lecture de la Bible. Nous pouvons alors comprendre pourquoi ils s'acharnent avec tant d'énergie contre les méthodes exégétiques. Dans la mesure où nous leur proposons de comprendre un texte biblique dans le contexte où il fut écrit et surtout de retrouver l'intention de l'auteur, nous venons faire échec à leur clé d'interprétation […] ». Luc Chartrand, p. 64
Par exemple, le philosophe Michel Onfray dans son Traité d’athéologie, détecte dans les textes bibliques « un tissu de contradictions » qu’il dévoile avec détails à ses lecteurs. p. 170-175. De même, Normand Rousseau a rédigé un volume de 593 pages uniquement pour relever les incohérences et contradictions de la Bible (La Bible démasquée, Incohérences et contradictions, Louise Courteau, éditrice inc, 2010, 593 p., pp. 572-573). Il rejette d’emblée la méthode scientifique historico-critique: «Moi, je m'en tiens à la lecture littérale pour démasquer la Bible ». Pour lui, cette recherche du sens des textes bibliques sert à « imposer n'importe quelle croyance ou dogme. Et surtout, écrit-il, cette recherche des sens a pour but de sauver la peau des textes parce que leur lecture littérale devient embarrassante ou parfaitement ridicule et qu'il faut protéger une doctrine ». Son ouvrage atteste des contradictions et absurdités générées par une lecture au premier degré (réf. t), mais assumées comme telles.
Normand Rousseau, La Bible démasquée, Incohérences et contradictions, Louise Courteau, éditrice inc, 2010, 593 pages, pp. 11-34 et 572-573)
Normand Rousseau soutient une interprétation personnelle de la Bible qui n’accepte pas l’exégèse scientifique moderne ( ) Il admet que le contexte culturel d’une époque peut servir à comprendre un texte ancien mais juge que cela sert de prétexte pour masquer « l’immoralité de la Bible » ( p. 18)
- « Avec toutes les recherches et les trouvailles des deux derniers siècles, les exégètes en sont venus à lire, interpréter et comprendre les textes bibliques d'une façon très différente que par les siècles passés. Mais je pense qu'il s'est installé un énorme malentendu dans l'interprétation de ces découvertes ». p.80
Il préfère s’en remettre à d’autres interprétations, comme celle-ci de Michel Onfray qui écrit-il, remet Jésus dans son contexte historique : « Ce que l’on peut dire, c'est que l'époque dans laquelle Jésus apparaît prétendument fourmille d'individus de son acabit, de furieux prophètes, des fous illuminés, d'hystériques convaincus de l'excellence de leurs vérités grotesques d'annonciateurs d'apocalypses ». Michel Onfray, Traité d'athéologie, p. 150.
En conclusion, le fondamentalisme athée s’appuie sur la position du fondamentalisme chrétien et rejette avec ce dernier la position des Églises protestantes non fondamentalistes et de l’Église catholique quant au doute méthodique.
3.2.3 Le refus du doute existentiel
Le professeur de philosophie Georges Leroux soutient que « si on nie la possibilité même de la révélation, notamment pour affronter le fondamentalisme, on se place immédiatement dans une position intolérante; en retour, tous ceux qui adoptent la position de la révélation, doivent aussi accepter que chacune de leurs affirmations soit librement critiquée par l'exercice des procédures de la raison (d) ». Georges Leroux, « Fondamentalisme et modernité: les trois monothéismes et les impasses de la raison », Horizons philosophiques, vol. 13, n° 1, 2002, 71-89, p. 88. URI: http://id.erudit.org/iderudit/801225ar DOI: 10.7202/801225ar
Jean-Claude Ravet est d’avis que le fondamentalisme se caractérise par une fermeture du sens. Il précise : « Un repli dans la certitude, au-delà de la croyance. La recherche d’un pouvoir contrôlant et d’une sécurité rassurante et fantasmée, qui esquive la liberté et la responsabilité à l’égard du monde et court-circuite le jugement critique ». Le fondamentaliste chrétien ou athée évite le questionnement. Il n’a que des certitudes à présenter.
JEAN-CLAUDE RAVET Relations, n° 754, 2012, p. 3. http://id.erudit.org/iderudit/67065ac
3.3 L’explication de causes naturelles par des causes surnaturelles : le créationisme et ses variantes
Selon le théologien John F. Haught, le fondamentalisme athée (le Nouvel athéisme) prend le créationnisme ou le dessein intelligent pour cheval de bataille dans la lutte qu’il croit mener contre le christianisme ( s ) qu’il confond ensuite avec le fondamentalisme chrétien ( r ). Ce n’est guère surprenant, ajoute-t-il, puisque le fondamentalisme athée s’abreuve de la littérature créationniste ou de celle favorisant le dessein intelligent (Intelligent Design). En général, les scientifiques, qu’ils soient athées ou religieux, ne commettent pas cette généralisation trompeuse. ( t )
( r ) John F. Haught, Georgetown University. God and the New Atheism: A Critical Response to Dawkins, Harris, and Hitchens. Louisville: Westminster/John Knox Press, 2008.
(s) Le fondamentalisme chrétien détourne le sens spirituel de « création » pour en faire un concept scientifique. Voir Jacques Arnould, la théologie après Darwin : éléments pour une théologie de la création dans une perspective évolutionniste, Éditions du Cerf, coll. « Théologies », Paris, 1998, 302 p. (ISBN 2-204-05848-3)
(t ) Dans une interview au journal espagnol El Mundo, le prix Nobel Peter Higgs admet qu'il connaît beaucoup de collègues qui sont scientifiques et croyants, et considère que la science et la religion peuvent être compatibles, pourvu que l'un et l’autre ne soient pas dogmatiques. Elles n’ont simplement pas le même objet
In the El Mundo interview, Higgs argued that although he was not a believer, he thought science and religion were not incompatible.
The Guardian, London U. K., « Peter Higgs criticises Richard Dawkins over anti-religious 'fundamentalism' ».
http://www.theguardian.com/science/2012/dec/26/peter-higgs-richard-dawkins-fundamentalism
Dans une perspective symétriquement opposée au créationnisme, le scientisme, qui n’est pas de l’ordre de la science mais plutôt une philosophie matérialiste, suppose que la science « fait connaître les choses comme elles sont, résout tous les problèmes réels et suffit à satisfaire tous les besoins légitimes de l'intelligence humaine ». (p) Le scientisme croit que « l'esprit et les méthodes scientifiques doivent être étendues à tous les domaines de la vie intellectuelle et morale sans exception » ( j). Par exemple, Richard Dawkins considère que la science ne laisse pas d'espace à la croyance religieuse (i); il est en désaccord avec le principe de non-recouvrement des magistères défendu par le scientifique Stephen Jay Gould 53, qui propose de distinguer le domaine de la recherche des faits et celui de la recherche du sens.
(en) Stephen J. Gould, Nonoverlapping Magisteria
http://www.stephenjaygould.org/library/gould_noma.html
(i) (en) Richard Dawkins, The God Delusion, Boston, Houghton Mifflin Co., 2006 (ISBN 0-618-68000-4), p. 50.
http://www.theguardian.com/uk/2002/mar/09/religion.schools1
(p) André Lalande, Vocabulaire technique et critique de la philosophie », (Quadrige / PUF, 2010, p.
« SCIENTISME » et « Scientiste ». Néologismes employés (tout d'abord en un sens péjoratif) pour désigner soit : 1° l'idée que la science (au sens D) fait connaitre les choses comme elles sont, résout tous les problèmes réels et suffit à satisfaire tous les besoins légitimes de l'intelligence humaine ; — soit 2° (moins radicalement) l'idée que l'esprit et les méthodes scientifiques doivent être étendues à tous les domaines de la vie intellectuelle et morale sans exception.
Ce mot a été ensuite accepté en un sens plus ou moins étendu, par quelques-uns de ceux qui accordent le plus d'autorité à la science.
(o) Le scientisme, qui une philosophie et non une science (o), n'accepte comme connaissance valable que les acquisitions des sciences positives, et par conséquent ne reconnaît à la raison d'autre rôle que celui qu'elle remplit dans la constitution des sciences. Le positivisme serait un scientisme, Le scientisme constitue en somme une thèse métaphysique. (E. Van Mme.)
Dans une allocution au Congrès nord-américain de l’Alliance athée internationale et Humaniste athée, Louise Mailloux, enseignante en philosophie, s’exprime ainsi : « Réconcilier la foi et la raison, cela signifie aussi formater les jeunes esprits en poursuivant la bataille pour limiter l’enseignement du darwinisme dans les écoles ou à tout le moins, avec le dessein intelligent, maquiller le créationnisme en science pour le présenter comme une alternative scientifique valable. Rien de moins que de réintroduire de la transcendance dans le monde du vivant. Connecter le surnaturel au naturel pour sortir la Bible et le Coran et moraliser la vie de tout le monde ».
https://louisemailloux.wordpress.com/2011/01/16/la-laicite-a-t-elle-tue-latheisme/ La laïcité a-t-elle tué l’athéisme? Publié le 16 janvier 2011
Allocution présentée au Congrès nord-américain de l’Alliance athée internationale et Humaniste athée, 1 octobre 2010
Mallon, Ron, "Naturalistic Approaches to Social Construction", The Stanford Encyclopedia of Philosophy (Winter 2014 Edition), Edward N. Zalta (ed.), <http://plato.stanford.edu/archives/win2014/entries/social-construction-naturalistic/>. « Epistemological Fundamentalism
--- Richard Rousseau utilise une lecture au premier degré de la Bible pour étayer ce point de vue : « Dans la Genèse, la Bible enseigne une autre erreur scientifique : Dieu créa l’univers en six jours et tout ce qui s’y trouve, entre autres la Terre et son contenu. L’homme est créé le sixième jour. On sait aujourd’hui que l’univers est apparu suite à ce qui ressemble à un Big Bang qui s’est produit il y a 13,7 milliards d’années. Pour ce qui est de l’homo sapiens, c’est le résultat d’une longue évolution par sélection naturelle de 4,55 milliards d’années. Encore là, la Bible enseigne une erreur. […] La preuve qu’il n’y a donc pas eu de révélation divine, c’est que la Bible enseigne ces erreurs, lesquelles sont également partagées par plusieurs peuples de l’Antiquité. Au contraire, une révélation divine aurait enseigné qu’il ne fallait pas croire ces erreurs ».
Richard Rousseau, « L’athéisme expliqué aux croyants, L’Actualité du 04-12-2014; texte sur internet : L’Association humaniste du Québec, http://assohum.org/2014/12/latheisme-explique-aux-croyants/ où l’auteur rapporte et résume ces ouvrages : Normand Rousseau, La Bible démasquée, Incohérences et contradictions, éditrice Louise Courteau, 2010 et du même auteur, Normand Rousseau, La Bible immorale, éditrice Louise Courteau, 2006.
Dans une étude intitulée « Defining American Fundamentalism », le professeur George M. Marsden montre que ces affirmations sur les erreurs de la Bible font partie de la perspective fondamentaliste. 22-37 Pour les fondamentalistes, conclut-il, la Bible est non seulement infallible mais doit aussi être exacte dans toutes ses affirmations d’ordre historique ou scientifique.
« For fundamentalists, this claim means that the Bible is not only an infallible authority in matters of faith and practice, but it is also accurate in all its historical and scientific assertions. […] Rather "literal where possible" is their interpretative rule. Whatever in the Bible can reasonably be given a literal reference should be interpreted as literal and accurate ». Defining American Fundamentalism, George M. Marsden, p. 25, dans The Fundamentalist phenomenon: a view from within, a response from without / edited by Norman J. Cohen, William. B. Eerdmans Publishing Co, Grand rapids, Michigan, 1990. 266 pages.
En conclusion, le fondamentalisme athée prend appui sur le fondamentalisme chrétien pour contredire la position de l’Église catholique et des Églises protestantes non fondamentalistes concernant la création.
3.4 L’hétéronomie de la conscience morale et de la conscience politique
3.4.1 L’hétéronomie de la conscience morale : une soumission aux textes religieux
Après avoir déclaré que « le monothéisme déteste l’intelligence », le philosophe Michel Onfray s’emploie, dans son Traité d’athéologie, à décrire la « kyrielle des interdits » car, ajoute-t-il, « on ne mesure bien l’obéissance qu’avec les interdits ». ( p. 103-114).
De même, Claude M. J. Braun déclare que la morale religieuse est une morale hétéronome, semblable à celle qu’on inculque aux enfants. (p. 96) Il ne voit pas de différence entre elle et la morale légale, sauf l’archaïsme de la première et la nature des punitions. ( p. 98 ) Mais il existe, ajoute-t-il, un deuxième degré de morale religieuse, plus élevé, plus rafiné : une interprétation de la morale « comme une liste de vertus et une liste de vices » : «C'est une morale de machine, inventée pas des moines totalement déconnectés de la vraie vie, avec pour seuls compagnons une plume et une feuille de papier au fond de leurs sinistres monastères ». p. 99
Ces exemples montrent une symétrie avec le fondamentalisme chrétien, lequel s’oppose pour les mêmes raisons à la position de l’Église catholique et des Églises protestantes non fondamentalistes quant à l’hétéronomie de la conscience morale.
3.4.2 L’hétéronomie de la conscience politique: une soumission aux autorités civiles
Le philosophe Michel Onfray soutient que la soumission aux autorités civiles est encouragée par le christianisme. ( k) Il s’appuie, comme les fondamentalistes chrétiens, sur l’épître de Saint Paul aux Romains, et il suit le même cheminement que ceux-ci en utilisant la même lecture hors contexte et au premier degré (t). Il conclut de suite aux conséquences : « le compagnonnage de route avec tous les fascismes du XXe siècle — Mussolini, Pétain, Franco, Hitler, Pinochet, Salazar, les colonels de la Grèce, les dictateurs d'Amérique du Sud, etc. Des millions de morts pour l'amour du prochain. »(l).
Dans son étude du fondamentalisme protestant en Amérique latine, le professeur Pablo A. Deiros souligne que des milliers de catholiques partisans de la théologie de la libération ont été emprisonnés, torturés, et exécutés sous le régime Pinochet en raison de l’activisme de fondamentalistes chiliens qui comprenaient l’épître aux Romains de la façon mentionnée par le philosophe Michel Onfray.( u)
(k) Michel Onfray, Traité d’athéologie, Éditions Grasset et Fassquelles, Le livre de poche, 2005, p. 234 (t) déja cité` : Pablo A. Deiros, professeur de théologie, Université de la Californie, Protestant Fundamentalism in Latin America. Collectif. Fundamentalisms Observed, Volume I. Édité par Martin E. Marty et R. Scott Appleby, The American Academy of Arts and Sciences, The University of Chicago Press, 1991, Chicago, London, pp. 142-196.
(u) Pablo A. Deiros, p. 175
(l) Michel Onfray, Traité d’athéologie, Éditions Grasset et Fassquelles, Le livre de poche, 2005, p. 235
3.5 L’exclusivisme et l’absolutisme du fondamentalisme athée
Selon un adepte du Nouvel athéisme, Claude M. J. Braun, « les théistes ne peuvent se réclamer de l'humanisme qu'au risque de violer les lois élémentaires de la logique. […] Ils répondent au credo, écrit noir sur blanc dans leur texte sacré, qui leur est révélé directement par Dieu ». » ( ) Braun, Claude M. J., Québec athée, Les éditions Michel Brûlé, Montréal, 2010, p. 121.
De manière symétriquement opposée, le théologien Pierre Lathuilière souligne que dans le fondamentalisme chrétien, « l'antihumanisme est une manière de se prononcer pour Dieu », et l’auteur montre que cela dénote surtout une incompréhension totale du christianisme. Pierre Lathuilière, p. 102
Cet exclusivisme du fondamentalisme athée rappelle également que des fondamentalistes chrétiens croient être les seuls « vrais chrétiens »; toute désignation plus restreinte leur déplaît. 19
19 BARR James, Fundamentalism, Londres, SCM Press, 1977, 379 p. (Édition de 1981) : « Les gens que d'autres appellent "fondamentalistes" se pensent eux-mêmes et voudraient s'appeler eux-mêmes simplement "chrétiens" ou "vrais chrétiens" : c'est là la véritable perception qu'ils ont d'eux-mêmes. Pour cette raison, toute désignation plus restreinte leur déplaît. Ils veulent penser leur propre position comme la ou la seule position chrétienne [...]. Ironiquement, ce trait dans leur manière de se comprendre, leur conception d'eux-mêmes comme les "vrais" chrétiens est exactement la raison pour laquelle ils sont généralement appelés non pas "chrétiens" mais "fondamentalistes" (p. 45). » Cité par Pierre Lathuilière, Le fondamentalisme catholique, p. 56
Un tel exclusivisme est aussi un absolutisme où chacun est l’hérétique d’un autre, écrit Luc Chartrand : « c'est ainsi qu'on en arrive fatalement à se rejeter les uns les autres […]
Les fondamentalistes s'orientent donc nécessairement vers une dynamique d'oppositions et d'exclusions multiples ». (1.1)
(1.1) Luc Chartrand, La Bible au pied de la lettre : le fondamentalisme questionné, Mediaspaul, 1995, p. 62.
refus du dialogue http://www.toupie.org/Dictionnaire/Fondamentalisme.htm Fondamentalisme, fondamentaliste "Tous les fondamentalismes, qu'ils soient politiques, religieux ou scientifiques, ont une matrice similaire : ils considèrent leurs interlocuteurs non comme d'indispensables et légitimes contradicteurs mais comme des incarnations du Mal, des ennemis à abattre. Il existe des fondamentalismes religieux, de gauche, de droite et même écologistes ou de décroissance. Quelle que soit leur tendance, les fondamentalismes se caractérisent par le fait que tous donnent une explication "totale" du monde et de la condition humaine." Vincent Cheynet - Le choc de la décroissance, Éditions du Seuil, 2008 - 213 pages
http://vigile.quebec/Les-trois-grands-fronts-de Les trois grands fronts de résistance contre la Charte de la laïcité Le projet de Charte des valeurs soulève des enjeux qui vont bien au-delà de la laïcité parce qu’il confronte directement trois fronts de résistance qui sont bien implantés dans notre société ; Le troisième front est celui de l’interreligieux dans lequel toutes les religions sont solidaires les unes des autres, espérant ainsi ramener le religieux dans les institutions publiques et faire ainsi reculer la laïcité. Finalement le front de l’interreligieux qui appuie sans aucun scrupule les islamistes, fondant dans cet islam anti-laïque un immense espoir de retour du religieux pour le Québec. Les catholiques de gauche enseignant dans les facultés de théologie ou de sciences religieuses de nos universités, ceux qui militent à Québec solidaire, à la Fédération des Femmes du Québec de même qu’à la Ligue des droits et libertés sont particulièrement actifs dans ce dossier.
Isolationisme et absolutisme
http://www.anthropoetics.ucla.edu/ap1502/1502Watson.htm
Both religious and secular fundamentalists, then, depend on a type of fideism. The faith of religious fundamentalists is the acceptance of truths without regard to competing claims of reason; the faith of comprehensive secular fundamentalists is that without empirical reason, there is nothing. Religious fundamentalists isolate themselves by ignoring claims that might undermine their religious understanding, while secular fundamentalists follow an epistemology that separates them from those who regard religion as at least a potential source of truth (Conkle 349-50). Each group resides in its own epistemology, isolated from the other, and unable to communicate across the divide (Conkle 348).
http://www.toupie.org/Dictionnaire/Fondamentalisme.htm
Fondamentalisme, fondamentaliste
"Tous les fondamentalismes, qu'ils soient politiques, religieux ou scientifiques, ont une matrice similaire : ils considèrent leurs interlocuteurs non comme d'indispensables et légitimes contradicteurs mais comme des incarnations du Mal, des ennemis à abattre. Il existe des fondamentalismes religieux, de gauche, de droite et même écologistes ou de décroissance. Quelle que soit leur tendance, les fondamentalismes se caractérisent par le fait que tous donnent une explication "totale" du monde et de la condition humaine."
Vincent Cheynet - Le choc de la décroissance, Éditions du Seuil, 2008 - 213 pages
De la même façon que les chrétiens fondamentalistes se proclament les seuls vrais chrétiens, l’humanisme devient une appellation appartenant exclusivement aux athées.1
7 Arkoun Mohammed, Baubérot Jean, Drai Raphaël, Smyth-Florentin Françoise. Débat avec Mohammed Arkoun, Jean Baubérot, Raphaël Drai et Françoise Florentin-Smyth. In: Autres Temps. Les cahiers du christianisme social. N°38, 1993. pp. 64-77. http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/chris_0753-2776_1993_num_38_1_1585 « Il y a des religions à l'intérieur d'une même confession […] On peut aussi parler de fondamentalisme biblique chaque fois que dans nos propres Églises, ou à leur frange, l'Évangile est lu, non pas dans une perspective de dynamique libératrice — dynamique qui ne peut laisser présager l'état du sujet au bout de sa lecture — mais au contraire dans une perspective propre à sauvegarder au maximum l'identité du lecteur. Le Livre sert ainsi à majorer le pôle religieux identitaire ou le pôle identitaire dans le religieux; »
Collectif, Harriet A.Harris, Protestant Fundamentalism », Fundamentalisms, Paternoster Press, 2001, pp. 34-35, « It served to discourage self-critical reflection. It implicitly discredited as false criticism any study that threw up unresolved tensions in scripture. »
Manichéisme
4 Alain Thomasset, Introduction à l'éthique, Penser, croire, agir, Collectif, Jean-Daniel Causse et Denis Müller, Les Editions Labor et Fides, 2009, 680 pages, p. 132. ISBN: 978-2-8309-1362-0 « Un autre obstacle [que celui du fondamentalisme chrétien] est celui, symétrique, du sécularisme (aussi appelé fondamentalisme athée). […] Ils argumentent du fait que la distance culturelle de notre société par rapport à des sociétés qui pratiquaient la guerre sainte, le sacrifice des enfants, la subordination des femmes ou l’exécution publique par lapidation, est trop grande pour sauvegarder un quelconque rôle moral l’Écriture. […] Comme dans le fondamentalisme, l’erreur séculariste refuse d’entrer dans un dialogue et un travail d’interprétation vis-à-vis de l’Écriture. […] Comme le fondamentalisme, elle cautionne la normativité d’une culture ambiante, cette fois-ci souvent libérale, qui n’est pas critiquée ». p. 132
Le fondamentalisme, qu’il soit religieux, séculier ou athée, se voudrait critique parce qu’il se permet d’attaquer toute idée qui ne lui est pas conforme, mais son intolérance émotive lui fait perdre toute véritable sens critique (self-critical thinking) (note 1).
(note 1) : Voici comment Fabrice Hadjadj décrit ce type
d’athéisme: « Les rivaux se ressemblent. L'athée a ceci de commun avec le fondamentaliste : il parle de Dieu avec autant de facilité. […] Votre athéologie vous renvoie toujours à la théologie, et votre appellation même — athée — contient le nom de Dieu dans sa queue. Si bien que ce nom vous colle à la langue, vous hérisse le poil, vous cause autant d'émotions, autant d'ivresses imbues, au fond, que le fondamentaliste, quoique en sens contraire. Et de même que le fondamentaliste met ce nom à toutes les sauces, vous le vouez à tous les diables. Pour le premier, il suffit de dire « Dieu », et tout est réglé. Pour le second, tout est réglé parce qu'on ne le dit plus (mais il faut à chaque fois redire qu'il ne faut plus le dire !). […] De part et d'autre, c'est la même jactance, c'est le même militantisme affairé ».
Fabrice Hadjadj, in Comment parler de Dieu aujourd’hui ? (Salvator) En parlant... Fabrice Hadjadj, Athée et Fondamentaliste, 10 octobre 2012 http://enpassant-englanant.blogspot.ca/2012/10/en-parlant-fabrice-hadjadj-athee-et.html
Le « Vocabulaire technique et critique de la philosophie » de Lalande (Quadrige / PUF, 2010, p. 197) attribue deux sens à « l’esprit critique » : il est, en bonne part, « celui qui n’accepte aucune assertion sans s’interroger […] » et, « en mauvaise part, celui qui est plus enclin à relever les défauts que les qualités ou qu’à produire quelque chose de positif ». Ce dernier sens, péjoratif, convient appartient à celui qui ne critique pas son propre système de pensée mais seulement celui qu’il combat.
5 Luc Chartrand, La Bible au pied de la lettre, Le fondamentalisme questionné, Mediaspaul, 1995, pp. 67 et ss. : « Au terme de ces observations, le fondamentalisme apparaît essentiellement comme une grille de lecture reposant sur une position « dogmatique » -- l'inspiration mécanique ou verbale de la Bible — enracinée dans une théologie de base qui se veut absolue et qui, en quelque sorte, a valeur de présupposé théologique non discuté, mais accepté aveuglément. […] Le souci de la lettre devient le moyen de justifier l'a priori théologique, qui, lui, est leur véritable fin. À la page 69 : « L'a priori ou présupposé théologique que nous avons mis en évidence rend plus précise la possibilité de cerner les différents types de fondamentalisme dont Barr fait état. De plus, il peut aussi laisser le loisir de discerner le fondamentalisme au sein d'autres 'cultures religieuses que celle de l'Occident. Ainsi, dans le monde islamique, le Coran permet également à des fondamentalistes une lecture particulière 28.
Ainsi le fondamentalisme ne devient pas apanage de certains groupes particuliers. Il nous relance sur notre propre terrain. »,
« Pour les croyants, les signes donnés dans la Bible indiquent que le vrai Dieu interviendra dans un proche avenir. Avant l’intervention divine, les Écritures annoncent une succession d’événements dont certains sont actuellement à l’œuvre. Puis, Il mettra une fin définitive aux conditions lamentables et à la méchanceté très répandue. La bonne nouvelle, les conditions sur la terre vont changer de façon radicale en faveur de ceux et celles qui sont humbles de cœur et qui Lui obéissent. »
Richard Rousseau, « L’athéisme expliqué aux croyants, L’Actualité du 04-12-2014 et sur le site de L’Association humaniste du Québec, http://assohum.org/2014/12/latheisme-explique-aux-croyants/
« Les athées croient que la contradiction entre un dieu bon et miséricordieux et le châtiment éternel pour incroyance est une telle énormité que le déni de ciel n'a aucune crédibilité. Les athées qui ont vécu une vie moralement exemplaire devraient n'avoir aucune crainte des feux de l'enfer ». Braun, Claude M. J., Québec athée, Les éditions Michel Brûlé, Montréal, 2010, p. 164
L’hétéronomie
« Ils [les théistes] répondent au credo, écrit noir sur blanc dans leur texte sacré, qui leur est révélé directement par Dieu ». Braun, Claude M. J., Québec athée, Les éditions Michel Brûlé, Montréal, 2010, p. 121.
Dans son ouvrage « Dieu l’hypothèse erronée. Comment la science prouve que Dieu n’existe pas », Victor Stenger affirme que l'Église proclame la vérité de Dieu à laquelle les politiques de l’État doivent s’assujettir: « Contre toute vraisemblance historique, les théistes américains continuent d'affirmer que Dieu est au fondement du système politique des États-Unis et que tous, citoyens ou dirigeants politiques, doivent se conformer à leur interprétation très particulière de la volonté de Dieu ». Comme les fondamentalistes chrétiens, il cite hors contexte l’Épître aux Romains, 13, 1-5. Cette lettre que Paul adressait aux premiers chrétiens de Rome dans un contexte de persécution leur demandait de se soumette aux autorités en charge et de payer leurs impôts non seulement par crainte du châtiment, mais par motif de conscience ». 1 1 Victor Stenger, «Dieu l’hypothèse erronée. Comment la science prouve que Dieu n’existe pas », p. 306. L’auteur cite un article de la publication religieuse First Things : God’s Justice and Ours, par le juge Antonin Scalia, May 2002.
4. le fondamentalisme dans le judaïsme
5. le fondamentalisme dans l’islam
6. le fondamentalisme dans les religions orientales : le bouddhisme, l’hindouisme, le fondamentalisme dans le sikhisme et le shintoïsme.
- ^ Sébastien Fath, « FONDAMENTALISME », Encyclopædia Universalis, consulté le 4 décembre 2015, http://www.universalis.fr/encyclopedie/fondamentalisme